Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 16.djvu/728

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rhin, Louis en Hollande et Joseph à Naples. Soit ; mais, lors de la coalition précédente, en 1805, la Confédération du Rhin n’existe pas, les Bourbons règnent encore à Naples et même ils figurent parmi les coalisés ; les Autrichiens possèdent Venise, l’Istrie, la Dalmatie ; c’est donc le royaume d’Italie, Milan, les Légations, Gênes, le Piémont annexés. Soit ; mais, lors de la coalition précédente, en 1798, on ne voit ni de royaume d’Italie, ni de Piémont en départemens : ce sont donc les républiques, batave, helvétique, cisalpine, ligurienne. Soit ; mais, en 1795, les républiques n’existent pas, et si la guerre est poursuivie avec acharnement par l’Angleterre et par l’Autriche, c’est donc pour les Pays-Bas et la rive gauche du Rhin, les « limites naturelles. » Soit ; mais, en 1793, lorsque se forme la grande coalition, celle qui réunit toute l’Europe, non seulement la France n’envahit point, mais elle est envahie ; il ne s’agit point même de la refouler dans ses anciennes limites, il s’agit de l’y entamer : les Flandres, la Picardie jusqu’à la Somme, la Lorraine, l’Alsace, la Comté, le Dauphiné peut-être. C’est donc alors la propagande révolutionnaire et le régicide, le scandale donné à l’Europe monarchique, la sortie des conquérans de 1792, le péril de tous les trônes. Soit ; mais lorsqu’on février 1792, se noue entre l’Autriche et la Prusse la première alliance, matrice de toutes les coalitions futures, Louis XVI est sur le trône et la propagande n’est qu’un thème de harangues. C’est donc à la vieille France que l’on en veut, et il faut en venir là pour découvrir le fondement, et, comme on dit des navires, les œuvres vives de toutes les coalitions.

En 1791, Louis XVI est en péril et le principe monarchique est menacé, par la constitution même que les Français lui ont imposée ; or, quand ils parlent de le secourir, c’est-à-dire de se protéger eux-mêmes en sa personne, quels discours tiennent ceux qui cherchent à nouer l’alliance des rois contre ces Français turbulens ? Les mêmes que tenaient, quelque quatre-vingts ans auparavant, les coalisés d’alors, aux conférences de Gertruydenberg : rogner la France, lui enlever l’Alsace et la Lorraine. Louis XIV régnait alors : s’il menaçait quelque chose, ce n’était certes pas le « principe monarchique. » Les futurs coalisés, en 1791, songeaient si peu à défendre le « principe » qu’ils se félicitaient de voir cette monarchie française affaiblie par sa constitution nouvelle, se rongeant elle-même en son intérieur,