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l’intimité des tissus vivans. Pour ne citer que les chefs d’école, il faut nommer Voit et Pettenkofer à Munich, Pflüger à Bonn, Rubner, Zuntz à Berlin, et Chauveau à Paris.

Le résultat le plus général de ces recherches a été d’établir que l’organisme, et le foie en particulier, pouvaient former de la matière glycogène aux dépens des matières azotées ou protéiques de la ration si celle-ci en contient, et dans le cas contraire, par exemple si l’animal est soumis à l’inanition, aux dépens des matières protéiques des tissus. — Quant aux graisses, la question de savoir si elles peuvent être transformées en glycogène, n’est pas encore tranchée : aucune preuve décisive n’a été fournie à cet égard[1]. — De telle sorte que, des trois catégories dans lesquelles se rangent toutes les substances qui peuvent servir à l’alimentation ou se rencontrer dans les tissus comme constituans, à savoir : les matières azotées ou protéiques, les hydrates de carbone (sucres et amylacés) et les graisses, les deux premières seraient certainement employées par l’organisme pour la production du glycogène du foie. — Mais, si les deux catégories de substances interviennent comme matières premières dans la fabrication du glycogène, ce n’est pourtant pas indifféremment et à titre égal. L’opération est infiniment plus facile et économique lorsqu’elle porte sur les hydrates de carbone que lorsqu’elle porte sur les substances protéiques. Elle est aussi plus rapide. Le sucre n’a pas à subir les opérations plus ou moins laborieuses et lentes de la digestion intestinale non plus que de la glycogénie hépatique ou musculaire.


V

La démonstration de ces vérités physiologiques est délicate : elle suppose une infinité de notions préliminaires dont l’omission rendrait le récit des expériences inintelligible et dont

  1. Il faut reconnaître, cependant, que les persévérantes recherches de M. Chauveau rendent très vraisemblable la formation du glycogène aux dépens des graisses, sinon dans le foie, au moins dans les muscles. La formation aurait lieu par suite d’une oxydation incomplète de la matière grasse. Cette oxydation, bien que partielle, exigerait encore une grande quantité d’oxygène : il semble nécessaire de l’admettre pour expliquer l’énorme absorption d’oxygène qui se produit dans certaines circonstances sans qu’il y ait formation d’acide carbonique en proportion équivalente. M. Chauveau a même proposé une formule hypothétique de réaction qui est en accord remarquable avec les faits.