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seule. Il y a du sucre dans le sang, il y a du glycogène dans le foie, quel que soit le régime. Les carnassiers purs, qui se nourrissent de chair sanglante, ont un sang sucré comme les herbivores et les frugivores, qui consomment surtout des substances amylacées et sucrées. Le sang des omnivores eux-mêmes et de l’homme, qui varient leur nourriture et y font prédominer, suivant les circonstances, telle ou telle des trois catégories de substances alimentaires : azotées ou albuminoïdes, — graisses, — hydrates de carbone (féculens et sucres), possède une teneur en sucre invariable : ses proportions n’éprouvent que des oscillations insignifiantes autour du chiffre fatidique 1gr, 5 par litre. Le glycogène, en conséquence, a lui aussi, dans le foie, une existence invariable.

L’inanition elle-même ne porte pas atteinte à cette fixité. Le cheval abandonné pendant une ou deux semaines à la diète absolue, le lapin soumis au jeûne pendant cinq à six jours, le chien exposé pendant près d’une quinzaine à l’inanition sans recevoir autre chose que de l’eau, tous ces animaux affamés systématiquement conservent au cours de ces longues périodes d’abstinence alimentaire le taux à peu près normal du sucre sanguin. — Ils conservent aussi du glycogène dans leur foie : l’analyse chimique en fournit la preuve. Il faut ajouter qu’ils en forment constamment, puisqu’ils en dépensent constamment aussi, pour fournir aux besoins en sucre, du sang et des tissus.

Il est donc de toute évidence que le glycogène hépatique a d’autres origines que les hydrates de carbone de l’alimentation. Le sucre et les féculens qui entrent dans la ration, s’ils contribuent comme matière de choix à la formation de la précieuse substance génératrice du glucose, n’en ont pas le monopole. À leur défaut ou simultanément avec eux, l’organisme met en jeu d’autres matériaux : il dispose d’autres ressources.

C’est à la recherche de ces matériaux et de ces procédés accessoires de la fabrication du glycogène dans le foie que se sont consacrés un certain nombre d’expérimentateurs contemporains. La question des origines de l’amidon animal, ouverte dès le moment de la découverte de cette substance par Claude Bernard, en 1857, approche enfin de sa solution.

L’honneur en revient aux physiologistes qui se sont consacrés à l’étude de la chimie de la nutrition, c’est-à-dire des échanges matériels si compliqués et si mobiles qui s’accomplissent dans