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On voit, d’après ces indications, combien est utile l’œuvre de l’assistance indigène et qu’on ne saurait trop rendre hommage à l’abnégation, au dévouement de nos médecins coloniaux. Il ne leur manque qu’une chose : le nombre, car ils ne suffisent pas à la tâche, et le colonel Lyautey fait remarquer avec beaucoup de raison que le rôle « du médecin mobile perd toute efficacité s’il s’applique à une région telle qu’il ne puisse la visiter qu’une ou deux fois par an, sans suivre les effets de la médication ; son rôle n’est utile que s’il est affecté à une région assez restreinte pour qu’il puisse y exercer une action constante et y ramener à la petite formation sanitaire centrale, qu’il y improvisera toujours, les malades qui ont besoin de soins suivis. Il lui faut un point d’attache et autour de lui un champ limité au rayon d’action qu’il peut parcourir mensuellement. Ce n’est pas en se promenant toute l’année et en passant comme un météore, qu’il peut laisser une trace durable. »

Toutes nos colonies souffrent du manque de médecins ; il faut donc en augmenter le nombre et, comme corollaire, augmenter dans les mêmes proportions le nombre des infirmiers français, qui est actuellement tout à fait insuffisant. Nous accomplirons ainsi non seulement une œuvre humanitaire au premier chef, mais essentiellement utilitaire, car le premier des capitaux est le capital humain.


V

Il ne suffit pas de sauver le plus possible de vies humaines et d’arracher l’enfant à la mort ; il faut le civiliser, l’élever et l’instruire.

L’histoire de l’enseignement à Madagascar est très curieuse et résume, pour ainsi dire, la longue lutte d’influence soutenue entre la France et l’Angleterre au moyen des missions catholiques et des missions protestantes. Ce n’est guère cependant qu’à partir de 1820 que l’enseignement prit un véritable essor en Imerina, à la suite d’un accord intervenu entre l’agent du gouvernement anglais, Hastie, l’ambassadeur sir Robert Farquhar, et le roi Radama Ier. À cette époque, relativement récente, la langue malgache, jusqu’alors langue purement parlée, sauf par les Ombiassy[1] qui recouraient à l’écriture arabe, passa

  1. Sorciers.