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royauté. Elle restait, parmi ces équivoques, comme pendante[1] et l’on commence à s’expliquer déjà qu’au milieu du règne de Louis XIII, les catholiques perspicaces, convaincus et ardens aient ressenti le besoin de faire leurs affaires eux-mêmes.

J’ajoute que l’on s’en rend encore mieux compte à la date précise de 1627, où la Compagnie du Saint-Sacrement fut conçue.

C’est l’époque où Richelieu ne se gênait plus d’aucun scrupule pour pratiquer cette politique « réaliste » et laïque, très peu inquiète de froisser, voire de combattre ouvertement le Saint-Siège, et visiblement décidée à subordonner les intérêts de l’Eglise à ceux de l’Etat. On sait aussi quelle opposition lui faisaient, sous la conduite du cardinal de Bérulle et de Michel de Marillac, les « Dévots, » qui, appuyés sur les « catholiques zélés, fort nombreux alors dans le royaume[2], » préconisaient, à l’encontre, « la chimère d’une politique confessionnelle[3]. » Mais de ces hardiesses scandaleuses de Richelieu, dans sa diplomatie comme dans son gouvernement intérieur, « Dévots » de cour et « zélés » de province ne devaient-ils pas naturellement induire une irrémédiable indifférence du cardinal-ministre pour le relèvement spirituel et moral du clergé et des fidèles catholiques ? De ce « pontife des calvinistes, » de ce « patriarche des athées, » pouvait-on attendre qu’il s’intéressât jamais à la renaissance de l’Eglise de France ? Sans doute on se trompait, puisque, dès 1624, les papiers de Richelieu[4] nous le montrent faisant, dans ses préoccupations, une place à ce grand sujet, et esquissant, pour l’avenir, un plan de réformes religieuses qui répondait presque de tous points aux vœux du Tiers-Etat et même à ceux du clergé[5]. Mais ses pensées d’avenir étaient secrètes, tandis que ses actes publics et présens s’affirmaient, de plus en plus impropres à faire espérer qu’il devint jamais l’exécuteur ou l’auxiliaire d’une restauration du « règne de Dieu » dans le royaume de France. C’est pourquoi cette année 1626, où il accordait aux huguenots une paix contre laquelle les « Dévots »

  1. Cf. d’Avrigny, Mémoires chronologiques, t. Ier, p. 42, 43, 45, 226, 229, 230.
  2. Le P. Grillet, Histoire de Louis XIII. t. Ier, p. 479, 480.
  3. L’abbé Houssaye, le Cardinal de Bérulle et Richelieu, p. 52. G. Fagniez. Le Père Joseph et Richelieu, t. Ier, y 186 188. 219.
  4. Papiers d’Etat de Richelieu publiés par Avenel, t. II, p. 159, 168. ss. Plans concertés, probablement en 1624-1625, par Richelieu et l’évêque Charles Miron.
  5. Par l’acceptation du Concile de Trente, au moins dans la mesure où les droits du Roi n’en seraient pas lésés.