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variante encore[1], à peine réveillée, des Xoana vaguement féminins, — Belles-au-bois-dormantes dans leurs gaines de cèdre parfumé, que, un peu plus tard, on imitera avec plus d’art dans le calcaire plus dur, ou dans le tuf encore ductile ; — au VIe siècle, où apparaissent les grandes statues archaïques d’Apollon (de cette école dorienne qui semble la première contenir le germe de l’art personnel et comme autochtone du génie grec), où s’humanisent les beaux marbres du fronton d’Egine[2], où, dans l’Attique enfin, un peu retardataire encore, Endoïos, élève du légendaire Dédale, ose sculpter en marbre les premières images enfin vivantes d’Athéna ; puis, du VIe siècle à la première moitié du Ve, qui voit naître et se placer en rang près du sanctuaire les souriantes prêtresses aux ajustemens polychromes, et au jour, fameux entre tous, de la troisième année de l’Olympiade 85, où la grande Athéna-Parthénos, la déesse chryséléphantine, la « Vierge, » chef-d’œuvre de Phidias illustre et déjà menacé, fut placée dans la cella du Parthénon reconstruit, sous l’archontat de Theodoros, quelle progression merveilleuse d’art marmoréen ! et quelle radieuse procession de statues, jalonnant le chemin de l’histoire, encombrant d’un peuple de divinités vivantes le sommet sacré de l’Acropole ou les blancs abords des temples d’Olympie, déesses graves et douces sous les draperies coloriées, nudités sacrées, mais heureuses enfin, images, pour la première fois aimées, de la femme ! Hélas ! les barbares oseront toucher ces êtres purs, fils de l’homme qui désire et du feu qui purifie, et traverser et meurtrir le cortège sacré : les fines servantes de la déesse, malgré l’or et le carmin de leur « himation, » malgré la douceur muette de leur rire divin, furent renversées un jour, en 480, par les Perses vainqueurs. Blessées et douloureuses, et plus belles dans le sang de leurs vives couleurs, elles attendirent en vain la bataille de Salamine, qui sauva le monde de la barbarie magnifique d’Orient, mais non pas leurs grâces fragiles et délicieuses. Dédaignées par de plus nouveaux maîtres, — les réalistes du temps de Périclès, — elles furent enfouies, à la hâte, entre des couches alternées de moellons et de terre, et couchées, sans pompe et sans deuil, dans le remblai qui allait porter, reconstruit par Phidias et Iktinos, le Temple neuf, — le Temple, par excellence, — le Parthénon de 434. Puis, réveillées, après

  1. Homolle.
  2. Conservés à Munich.