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résolution affirmant le principe de la préférence commerciale et l’urgence de son adoption par les colonies en général, et exprimant aussi que, selon l’opinion des Premiers coloniaux, le gouvernement de Sa Majesté devrait réciproquement accorder un traitement de préférence aux produits des colonies. Les ministres canadiens désirent qu’il soit bien compris qu’ils agissent ainsi dans le vif espoir et dans l’attente (in the strong hope and expectation) que le principe de la préférence commerciale sera plus largement accepté par les colonies, et que la mère patrie appliquera ce principe, un jour prochain, en exemptant de droits de douane les produits coloniaux. Si, après avoir fait tous ses efforts pour amener cette réforme de la politique fiscale de l’Empire, le gouvernement canadien venait à se convaincre que le principe de la préférence commerciale ne peut être accepté par les colonies en général où par la mère patrie, le Canada aurait le droit de prendre les mesures qu’un tel état de choses lui ferait juger nécessaires[1]. »

Ainsi l’Angleterre ne pourra jouir longtemps des avantages du libre-échange chez elle et de la protection dans ses colonies. Elle devra choisir, et, si elle choisit la protection, ses colonies l’entraîneront loin. Nous ne ferons que citer la résolution de la conférence[2] déclarant que, « dans tous les contrats passés soit par le gouvernement impérial, soit par les gouvernemens coloniaux, il est désirable qu’autant que possible les produits de l’Empire soient préférés aux produits étrangers. » Plus grave est la résolution qui reproduit, en l’adoucissant un peu, une motion de M. Seddon et attire l’attention des gouvernemens coloniaux et métropolitain « sur l’opportunité qu’il pourrait y avoir à

  1. Blue Book de la Conférence coloniale, p. 37.
  2. Le Livre Bleu contient à ce sujet une édifiante correspondance entre les ministres britanniques de la Guerre, de la Marine et des Colonies et le premier ministre Australien. Celui-ci leur transmet une pétition des producteurs et exportateurs de la Nouvelle-Galles du Sud, se plaignant que l’on ne donne pas à l’Australie sa juste part dans les fournitures pour l’armée de l’Afrique australe et signalant les articles violens (strongly worded) qui paraissent dans les journaux sur l’indifférence du War Office à l’endroit des intérêts australiens ; les administrations intéressées se défendent de leur mieux, produisent des listes de maisons australiennes avec qui elles ont traité, énumèrent les quantités de fourrages, de foins, de grains achetés en Australie ; le War Office déclare qu’il vient d’autoriser l’usage du mouton gelé deux fois par semaine dans les troupes de l’intérieur… On voit à quelles questions de boutique descend l’impérialisme et que les colonies, si chatouilleuses quand la mère patrie fait mine d’intervenir chez elles, s’immiscent dans les moindres détails de l’administration dans la métropole.