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des œuvres dont la popularité est indéniable et dont l’absence ne tarderait pas à constituer pour elles une cause d’infériorité.

Il ne nous déplaît pas de voir les écoles de l’État et les écoles libres rivaliser d’ardeur dans l’œuvre de la mutualité. Les enfans prendront dans les unes et dans les autres le goût de l’épargne et de la prévoyance. Souhaitons que, plus tard, ils se retrouvent tous mêlés ensemble au sein des mutualités professionnelles.

Comment, sur ce terrain, de même que sur tant d’autres, échapper à l’influence des luttes politiques et religieuses ? Pour en revenir aux sociétés d’adultes, quand on en parcourt les noms variés, significatifs et souvent pittoresques, n’y trouve-t-on pas comme un miroir des divers partis dont les chocs successifs forment l’histoire de la France depuis cent ans ?

Outre les sociétés à caractère professionnel ou confessionnel, nous en trouvons nombre d’autres qui ont été créées au hasard du courant des idées. Il y a d’abord les sociétés municipales dues à l’initiative de fonctionnaires ou de particuliers sur lesquels l’estampille officielle a gardé son prestige. Cette forme de la mutualité rassemble entre eux des hommes de profession, de milieux et d’intérêts différens. Les membres honoraires en sont souvent recrutés parmi les personnes ayant des attaches officielles, et il ne semble pas que ce soit là l’idéal d’une démocratie où les associations, issues de l’initiative privée, doivent garder leur complète indépendance vis-à-vis de pouvoirs publics éphémères. Ce type d’association, de formation artificielle, sera toujours inférieur à celui de l’association professionnelle, et, quand ce sera possible, on devra s’efforcer de substituer l’une à l’autre. Le décret-loi de 1852 investissait le maire et le curé du soin de créer des sociétés de secours mutuels. La conception impériale du maire et du curé, en 1852, ne répond plus maintenant à la même réalité sociale. Ce qui représentait alors un progrès dans la voie de l’initiative, quelque officielle qu’elle pût être, constitue un recul, maintenant que, remettant en honneur l’idée corporative, la loi de 1884 sur les syndicats professionnels a confié à la démocratie émancipée le soin de s’organiser elle-même.

Il en va de même de toute société de secours mutuels se recrutant dans un quartier urbain, dans une ville, dans une circonscription déterminée, ou même sur l’ensemble du territoire, au hasard des relations de ses fondateurs, réunion à laquelle