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Descriptio de situ Helvetiæ de Glareanus avait été mise en chansons et chantée par les jeunes gens. Des étrangers, diplomates comme Marsius (1555-1559) ou Scotti, simples voyageurs comme Montaigne (1580-1581), Burnet (1686) et Addison (1699), visitent et décrivent la Suisse. Deux des juges de Charles Ier, Ludlow et Broughton, viennent mourir à Vevey, où ils sont enterrés. En 1544, le professeur bâlois Sébastien Munster donnait quelques cartes, d’ailleurs assez grossières, de la Suisse. En 1575, Simler[1] ; en 1578, Tschudi, dans ses quatre grandes cartes ; puis, en 1642, Mathias Merian et Martin Zeiller[2], font paraître les livres que l’on peut considérer comme les ancêtres de Joanne, de Baedeker et de Murray. Ce ne sont pas cependant, à proprement parler, des guides. L’histoire et les hommes y tiennent plus de place que les curiosités naturelles. Dans son Mercurius Helveticus (1688), J. Wagner ne parle ni de Grindelwald, ni d’Interlaken, ni de Zermatt. Mais, au début du XVIIIe siècle, se publient deux ouvrages qui, souvent réimprimés, plus souvent encore copiés, vont commencer à attirer l’attention sur les beautés de la Suisse. Ce sont les Délices de la Suisse d’Abraham Ruchat (1714) et les Itinera alpina de Scheuchzer (1720), tous deux ornés de planches et de cartes ; le premier, mal ordonné et souvent mal informé, mais d’une lecture attrayante et commode à consulter, grâce à son index ; le second, résumé d’observations personnelles et consciencieuses, aussi complet, aussi exact que le permettait l’état de la science à son époque.

Le congrès diplomatique tenu à Bade en Argovie (1714) contribua aussi à la connaissance de la Suisse. Des fêtes extrêmement brillantes y furent données, et plus d’un bon Suisse se désola à l’idée que l’élégance et le luxe français, « le goût frivole et insouciant de cette nation » s’introduisaient ainsi dans sa patrie. « Le sang me monte au visage, écrit l’un d’eux, quand je relis les louanges que firent des Suissesses les gentilshommes français ; ces belles Suissesses arrivaient à ne plus dire : ou nein, mais oui ou non en français, et, par ma foi, plus souvent oui que non ! »

Le résultat de ces événemens et de ces publications ne se fit pas attendre. On compte à peine une vingtaine de relations de voyage en Suisse aux XIVe et XVIIe siècles, il en paraît plus de cent

  1. Commentarius de Alpibus, Zurich, -1575, in-8o, réimp. par les Elzévirs en 1633.
  2. Topographia Helvetiæ, Rhetiæ et Valesiæ, Francfort, 1642, in-folio.