Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 15.djvu/592

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

troppo poco, disait-il, e troppo timidamente. Il doit, je pense, être satisfait maintenant ; et, sans doute, il attend que M. Zanardelli s’engage sur les traces de M. Emile Combes. Vous verrez que M. Zanardelli s’abstiendra prudemment, — et patriotiquement, — de le faire.

Mais ces considérations générales, qu’il est trop facile de développer, et au bout desquelles on n’a rien prouvé, pas même la décadence de la France ou de l’Italie, ne sont heureusement pas à l’usage de M. J. Novicow. Ses opinions sur le « catholicisme, » ou généralement sur la religion, et sur le « militarisme, » ne diffèrent point en substance, nous le savons, de celles de M. Bazalgette et de M. Sergi. Elles ne sont pas moins « radicales, » ni moins « avancées, » — ou moins « arriérées » peut-être, s’il serait, hélas ! trop facile de montrer que son idéal social, et le leur, est celui du « divin Platon, » roi des sophistes et des Utopiens. Mais, comme sociologue, M. J. Novicow sait que les nations sont des organismes infiniment complexes, dont le progrès ou la décadence ne s’expliquent point d’une manière si simple ; et il sait surtout ce qu’il entre de « relatif » dans la composition de ces idées elles-mêmes de décadence et de progrès. * Les phénomènes sociaux, dit-il avec raison, sont d’une extrême complexité. Ils sont conditionnés par un grand nombre de facteurs. » Et, en vérité, c’est ce que n’ignore personne, mais tout le monde fait comme s’il ne le savait point. L’une des nouveautés du livre de M. J. Novicow sur l’Expansion de la nationalité française est d’être de quelqu’un qui le sait, et qui se souvient qu’il le sait.

Que voulons-nous donc dire, Latins, en général, et Français, en particulier, quand nous parlons de notre « décadence ; » et à quelle époque de notre histoire ou à quel idéal de vie nous référons-nous pour en juger ? M. J. Novicow s’est bien gardé de poser la question en ces termes, et, il est vrai que, si l’on veut ne pas la résoudre, ou n’y rien répondre qui vaille, mais seulement donner libre cours à sa rhétorique, c’est ainsi qu’il faut la poser. On fait alors œuvre de « moraliste, » comme chez nous La Bruyère ou Montaigne, qui ne nous ont pas représenté, je crois, la France de leur temps sous les couleurs de l’espérance ; on fait œuvre de « satirique, » à la manière de Boileau ; on fait œuvre de philosophe et de philosophe pessimiste, comme l’auteur des Pensées ou comme celui des Destinées : on ne fait pas œuvre de