Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 15.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suffisantes. Les communes devraient aussi, le cas échéant, faire garder les sources à peu de frais par une famille indigène installée à proximité. Le gouvernement général a entrepris sur les hauts plateaux des forages analogues à ceux qui ont si bien réussi dans le Sahara. C’est là une excellente initiative, et elle serait encore meilleure si elle était étendue à tout le Tell, et combinée avec quelques plantations.

Cette question des sources, bien que très complexe, n’est nullement insoluble ; une loi de 1851 déclare que les eaux, sous quelque forme qu’on les rencontre, appartiennent au domaine public, sauf les droits antérieurement acquis. Quels sont ces droits, quelle est leur origine ou leur étendue ? Il est assez difficile de le déterminer, au milieu des incertitudes et des variations de la jurisprudence ; mais ce qui est évident, c’est que le gouvernement avait un devoir étroit, dans un pays où l’eau est d’une telle importance ; il fallait ne rendre aux usagers la jouissance des sources qu’après en avoir assuré la conservation ; en se désintéressant de la question, il a, sur certains points, amené la disparition des eaux. A quoi bon, dès lors, avoir posé le principe si sage de la loi de 1851 ?

Avec l’élevage, la récolte de l’alfa constitue le grand revenu des hauts plateaux à Constantine et surtout à Oran. L’arrachage de cette plante si utile exige certaines précautions trop souvent négligées par les ouvriers ; au lieu de se borner à couper le nécessaire, ils enlèvent souvent touffes et racines ; il s’ensuit que le repeuplement est entravé et que les récoltes suivantes sont compromises. Une surveillance est donc indispensable, car de mauvais procédés d’exploitation amèneraient la diminution d’un commerce aujourd’hui très prospère, et la ruine de la couche si mince de terre végétale conservée par l’alfa. Cette surveillance revient à l’administration forestière.

Nous touchons ici à l’une des plus graves questions qui se posent en Algérie, celle du régime forestier ; elle a fait couler des flots d’encre, et s’est par cela même considérablement obscurcie ; tantôt on a dressé de violens réquisitoires contre les fonctionnaires des Eaux et Forêts ; tantôt on les a couverts d’éloges immérités, alors qu’on réservait toutes les sévérités pour la législation qu’ils étaient chargés d’appliquer. Ces deux points de vue sont également inexacts.

Peu d’œuvres, il faut le reconnaître, prêtent plus à la critique