Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/685

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans le dernier quart du siècle qui vient de s’achever, par la première des trois phases décrites tout à l’heure. Les Etats-Unis d’Amérique ont servi de champ clos, de 1878 à 1893, à la bataille la plus mémorable qui se soit livrée sur ce domaine ; et, comme tout, chez cette jeune et exubérante nation, atteint des proportions colossales, c’est par centaines de millions, par milliards de francs que se comptent les sommes dépensées par le Trésor de Washington au service des idées fausses qui ont pendant seize ans inspiré sa politique monétaire. Nous avons exposé plus haut comment le débat était clos : la loi de 1900 a proclamé que le dollar est un poids d’or, et posé ainsi un principe dont il est peu vraisemblable qu’aucun Américain essaie à nouveau de contester le règne souverain.

En Allemagne, une loi de la même année 1900 a sonné le glas funèbre du thaler. Les pays de l’Union latine, la France en première ligne, sont encombrés d’un énorme stock déçus de cinq francs, entassés en grande partie dans les caves de la Banque de France. Déjà, en 1894, nous avions demandé la dénonciation de ce lien monétaire qui a enchaîné dans une commune impuissance des pays aussi inégaux que le nôtre, l’Italie, la Belgique, la Suisse et la Grèce. Cette union, qui devait s’appliquer à toutes les monnaies, ne sort en réalité son effet que pour les monnaies d’argent : car les monnaies d’or de pays qui ne l’ont pas partie de l’Union, comme l’Autriche ou la Russie, circulent chez nous aussi bien que les pièces suisses ou italiennes ; point n’est donc besoin de convention spéciale à cet égard : du moment où la pièce d’or est frappée au même titre et au même poids que la nôtre, elle circule parallèlement à celle-ci. Mais, là où l’Union exerce une action, elle est déplorable, car elle nous force k accepter, pour leur pleine valeur nominale, les écus italiens, belges, suisses et grecs, qui valent intrinsèquement deux francs, et que nous sommes obligés de recevoir pour cinq.

Il faudra cependant avoir le courage, un jour ou l’autre, de regarder la situation en face et de songer au moyen de nous dégager d’un Irai Ni nuisible pour nous, inutile à nos associés, puis de nous débarrasser de l’excédent déçus qui nous restera après liquidation. D’autres pays, plus infestés que le nôtre de métal argent, comme l’Espagne, dont les ministres ont eu l’imprévoyance de faire frapper, au cours des dernières années, de grandes quantités de pièces en métal blanc, auront d’autant plus