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M. Balfour et sir John Gorst affirmaient que l’Education Bill plairait aux éducateurs, autant qu’il déplaît aux politiciens, les éducateurs leur ont donné raison.

Ceux-ci, d’après une enquête à laquelle s’est livrée une Revue anglaise[1], directeurs ou professeurs de collèges techniques dans des grandes villes industrielles, comme M. Wertheimer, de Bristol, M. Hopkinson, de Manchester, réformateurs sociaux, comme M. Barnett, de Toynbee Hall, clergymen libéraux, comme M. Wakefield, professeurs d’université, comme M. Laurie, Sir Oliver Lodge, etc., tous hommes représentatifs, affirment que l’Anglais tranquille et réfléchi se contente du relatif. Le Bill met obstacle aux abus nés de l’intolérance du clergé. Il donne une nouvelle vie, une nouvelle dignité aux autorités locales. Non seulement il améliore l’instruction primaire, mais ce qui est capital, ce qui n’existait pas sous la loi Forster[2], il concentre l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire (tel que l’entendent les Anglais) sous la même autorité. Il permet de les coordonner, il pose les fondemens de l’édifice qui aura pour couronnement l’organisation de l’instruction supérieure. Il satisfait au principe démocratique : il permet au fils du fermier pauvre qui se distingue à l’école de village d’atteindre par des degrés intermédiaires les hautes écoles. Dans le détail on aurait pu souhaiter mieux ; mais le progrès est excellent. Jusque sur les bancs de l’opposition à la Chambre des communes, il s’est trouvé un libéral, à tendances radicales, un ami de lord Rosebery, M. Haldane, le philosophe du parti, assez courageux pour le voter. Sans doute M. Haldane eût fait le Bill autrement. Il comprend, il partage, en une certaine mesure les griefs des non-conformistes. Mais ce n’est pas là l’essentiel.

L’essentiel, d’après M. Haldane, c’est que l’Education Act satisfait à la nécessité la plus pressante, qui est de réformer, de la base au sommet, tout le système d’éducation en Angleterre et cela dans un intérêt pratique, immédiat. Il s’agit de faire face à la concurrence allemande et américaine qui menacent l’industrie, source de revenu national d’où dépendent la Flotte, l’Empire, le

  1. The nineteenth Century, octobre 1902.
  2. Les School Boards n’avaient de compétence qu’en matière primaire, et une décision récente qui a fait grand bruit, avait arrêté les tentatives faites par quelques-uns d’entre eux, pour s’occuper de l’enseignement des adultes.