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voir quelques-uns de ses membres mis en accusation, conclure la paix avec la Hollande. Il s’en excuse humblement auprès de son allié, et par l’intermédiaire de Ruvigny, et par celui de William Lockart, ambassadeur d’Angleterre en France, chargé d’exprimer à Louis XIV « combien il était affligé d’être contraint de céder à la nécessité de ses affaires et à la violence que lui faisait la Chambre basse, et que rien ne serait capable de l’en consoler que si le roi voulait bien lui faire connaître qu’il compatissait à sa situation et que cette conduite involontaire ne diminuait rien de son amitié pour lui. » Louis XIV le tranquillisait par une lettre affectueuse : s’il fallait renoncer à avoir l’Angleterre pour alliée, il s’agissait d’obtenir au moins sa neutralité et une médiation bienveillante.

Pour maintenir le roi dans ces dispositions, le concours de la duchesse était précieux. Aussi, bien que l’heure de l’entente intime avec elle ne fût pas encore venue et que ses offres de service fussent assez souvent dédaignées, Ruvigny se fait avec empressement l’intermédiaire de diverses demandes qu’elle adresse au roi de France et qui concernent des parens ou des amis qu’elle voudrait voir favoriser, ou, indirectement, son désir d’obtenir le tabouret quand elle viendra à Versailles.

C’est qu’à ce moment son prestige à la cour croissait considérablement. Les conférences secrètes de l’ambassadeur de France avec Charles II, qui jusqu’en 1674 se tenaient dans la chambre à coucher de la reine, vont maintenant avoir lieu chez la duchesse de Portsmouth, représentante attitrée de l’influence française. C’est son ascendant personnel sur lord Danby, le ministre qui succède en 1674 à la Cabale et reçoit le titre de grand trésorier, qui amène cet homme prudent et circonspect à passer d’une hostilité complète à la France à une politique presque bienveillante. Aussi accuse-t-on la favorite de l’avoir pris pour amant. Elle laisse dire et contre-balance auprès du roi et des ministres les doléances des Parlementaires et des Hollandais. A l’ambassadeur des Pays-Bas, Charles II déclare qu’il serait « un grand coquin » s’il oubliait ce qu’il doit à Louis XIV ; à la fin de l’année, il proroge le Parlement et voit sans regret échouer une première fois le mariage du prince d’Orange avec la fille du duc d’York.

Dans toutes ces mesures, les contemporains signalent à l’envi l’action de la duchesse de Portsmouth, depuis le fanatique Burnet