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volontiers la nôtre. « Si, dit-elle, la maison appartient aux sœurs, si elles ou la communauté en ont la pleine propriété ou l’usufruit, si elles en sont locataires, si elles en jouissent par concession gratuite d’un tiers, si, en un mot, les sœurs sont « chez elles, » si elles ont la direction assise et établie de la maison, cette maison constitue un établissement de la congrégation, mais à ces conditions seulement. » Et nous comprenons fort bien qu’on puisse reviser ou compléter ces conditions ; les tribunaux s’y appliqueront avec l’autorité qui leur est propre ; une seule chose est inadmissible, c’est que la présence d’un nombre infime de congréganistes, ou même d’un seul, dans une maison où ils ne sont pas chez eux, constitue néanmoins un établissement de la congrégation. Puisqu’elle a été soulevée, la question doit être résolue ; et comment pourrait-elle l’être, sinon par la résistance d’un propriétaire qui, ayant recueilli un ou deux congréganistes, viendra dire : « Je suis chez moi, j’ai le droit d’y loger qui je veux, pourvu que je ne prête pas les mains à la constitution illégale d’un établissement congréganiste, et je soutiens que je n’ai rien fait de pareil, » A un homme qui tient ce langage, on ne peut désormais, si on n’est pas de son avis, faire qu’une réponse : lui envoyer du papier timbré et l’assigner devant les tribunaux. Quand les tribunaux auront prononcé en dernier ressort, tout le monde devra s’incliner : jusque-là on a le droit de ne rien faire, et il y a même des circonstances où ce droit devient un devoir.

On connaît la règle que s’est donnée M. Combes pour laisser subsister provisoirement des écoles congréganistes. Les grands principes n’ont rien à y voir. M. Combes supprime les écoles libres quand il en a lui-même de suffisamment nombreuses et vastes pour contenir tous les enfans de la commune : dans le cas contraire, il n’accorde ni ne refuse l’autorisation demandée et laisse la situation se prolonger telle quelle. Mais il prépare l’avenir en obligeant les communes à construire de nouvelles maisons d’école, ou à agrandir celles d’aujourd’hui. On sait à quel point les budgets communaux sont déjà surchargés de centimes additionnels : il faudra pourtant en voter encore d’autres, et peut-être, lorsque ces conséquences de la politique actuelle viendront à se produire, s’apercevra-t-on dans nos campagnes qu’il en coûte très cher de supprimer une liberté.

Quoi de plus facile à comprendre ? L’enseignement libre est donné à peu près à la moitié de nos enfans, sans qu’il en coûte rien à l’État ni aux communes : si on le supprime, aujourd’hui partiellement et demain complètement, l’État et les communes devront pourvoir