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ouvrières réparties en 22 villages ; et, dans un seul district du gouvernement de Kalouga, 2 000 ouvrières, appartenant à 39 petits villages, font chaque année pour plus de 20 000 roubles de dentelle de soie et de fil. Ces dentelles sont remises à des agens qui les échangent contre les étoffes dont la famille a besoin. Jamais ils ne payent en argent, mais ils procurent le matériel. En s’épuisant à un travail pénible qui lui use les yeux et altère sa santé, la dentellière gagne l’équivalent de 35 à 50 roubles par an. Les exploiteurs agissent de même pour les broderies sur toile qui sont vendues dans toute l’Europe. Les femmes russes les plus incapables de raccommoder leurs nippes et celles de leurs enfans brodent en perfection. Dans deux districts du gouvernement de Wladimir 8 000 brodeuses font pour 25 000 roubles de ces essuie-mains, de ces tabliers, de ces mouchoirs que l’on retrouve transformés en ornemens dans plus d’un intérieur luxueux.

Les brocarts, les passementeries, les broderies d’or, les galons de clinquant qui servent à la décoration des églises occupent 500 ateliers de 3 000 ouvriers et surtout ouvrières dans le grand village de Saint-Serge où se tiennent trois foires par an et que ne visitent pas moins de 100 000 pèlerins attirés par le célèbre couvent de Troïtsa. La fabrication des bas, des gants, des mitaines, la bonneterie en général, regarde presque exclusivement les femmes ; 4 000 dans le gouvernement de Wladimir, 2 000 dans celui de Nijni-Novgorod. Les tailleurs de caftans et de tchiouikas sont au nombre de 900 dans cinq gouvernemens. Les seules casquettes du gouvernement de Wladimir rapportent net 11 000 roubles.

Les chaussures en feutre, les filets pour la pêche sont par excellence industries de paysans. Dans le gouvernement de Novgorod, parens et enfans emploient la veillée à faire du filet, exporté sur la Mer-Noire, la mer Caspienne et le Volga. On gagne de 75 copeks à 3 roubles pour 40 livres de filets. Un millier de paysans s’emploie à la même besogne dans le gouvernement de Tver. Le gouvernement de Kalouga et quelques districts de Moscou ont la spécialité de la brosserie et produisent pour 245 000 roubles de brosses par an. Dans le gouvernement de Moscou plus de 8 000 personnes roulent des tubes ou moules à cigarettes, la cigarette étant aussi nécessaire au Russe que le pain quotidien. Mille ouvriers s’occupent à tailler des peignes, des boutons et autres objets en corne.

Près de Tver, 6 000 paysans font des manches de pompes, des