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On réclama le vote. L’Assemblée semblait gagnée, en grande majorité, à la reconnaissance formelle de Napoléon II. Il était temps que Manuel intervînt.

Jusque-là les orateurs, à quelque parti qu’ils appartinssent, avaient parlé avec franchise et netteté ; Manuel prit un autre ton. Ce ne furent plus, selon l’expression de l’Empereur, que « des si, des mais et des car, » des circonlocutions, des réticences, des équivoques, des conséquences démentant les prémisses, une obscurité cherchée, une confusion voulue. Par un miracle d’habileté, Manuel réussit à satisfaire les bonapartistes, à flatter les royalistes, à contenter les libéraux. Il démontra la nécessité de reconnaître Napoléon II, et les dangers de cette reconnaissance. Il déclara qu’il fallait proclamer le « fils de l’Empereur en vertu de la Constitution, et qu’il fallait cependant porter atteinte à Constitution » pour que tel ou tel prince ne pût être appelé à la tutelle du souverain mineur et pour laisser les intérêts immédiats de la patrie aux mains « des hommes éprouvés » (c’est-à-dire Fouché et ses dupes) à qui ils venaient d’être confiés. Il insinua que la reconnaissance de Napoléon II, « à quoi l’on ne pouvait se soustraire, » n’engagerait pas la Chambre au delà de l’ouverture des négociations, car si elles étaient défavorables au jeune empereur, les représentans seraient bien forcés « de sacrifier leur vœu le plus cher aux intérêts de la patrie,