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cette façon-là, le commandement pourra confier sans crainte de belles missions à leurs détachemens. Le fameux parti de 100 chevaux du premier Empire recommencera ses exploits. En combinant l’invisibilité et la puissance de ses fusils avec la vitesse de ses chevaux, il sera difficile à saisir. Il pourra donc s’éloigner des siens, faire de la découverte ou se lancer dans les lignes de communications ennemies, pour torpiller les chemins de fer, artères des armées modernes. »


Oui, c’est bien ainsi qu’il faut comprendre l’action de la cavalerie.

Mais ce n’est là qu’une partie des services que nous sommes en droit d’attendre d’elle. Quoique changé, son rôle dans la bataille va grandir. Grâce aux dragons, le commandement pourra porter, en quelques instans, où il voudra, les carabines et les canons nécessaires. Alors la réunion de nombreux escadrons et la nécessité de les faire agir par masses de 1 500 à 2 000 chevaux s’imposera. Mais il serait mauvais de constituer à l’avance ces groupemens, puisqu’ils doivent correspondre à des situations variant d’un jour à l’autre. Quand le moment sera venu, le général en chef mettra à leur tête l’officier qu’il croira le plus apte à la mission donnée, quitte à le remplacer le lendemain, s’il s’est montré insuffisant. Ce procédé fut souvent employé par Napoléon. Il est à retenir.

Ces groupemens de cavalerie auront presque toujours un grand rôle à jouer à la fin de la bataille.

Rendons la parole à notre officier de cavalerie.

« Dans les grandes batailles de l’avenir, qui dureront deux ou trois jours sur des fronts de 40 et 50 kilomètres, avec 500 000 hommes peut-être de chaque côté, il arrivera un moment où ces masses impressionnables ne pourront plus supporter l’extrême tension de leurs nerfs, où elles n’auront plus de force morale à opposer à l’événement ; où elles seront mûres pour la panique. Qui donc mieux que la cavalerie peut produire l’événement, peut causer la panique ? Quand le général croit, sent, devine que le moment psychologique approche, il réunit ce qu’il peut trouver d’escadrons. Il fait appeler l’officier qui les commande et lui dit : La situation est parvenue à son dernier degré. L’heure approche où un événement décidera de la victoire ou de la défaite. Je vous ai réuni là environ 5 000, 6 000 chevaux.