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engouffrèrent à tour de rôle et le hasard voulut, qu’après avoir refoulé le germanisme vers l’Occident, séparé le slavisme en deux tronçons inégaux, ce fût la race finnoise qui parvînt à s’y maintenir. Après la disparition des États éphémères fondés par les Huns, puis par les Avars, apparut la puissance hongroise, qui réalisa sur le moyen Danube un établissement définitif. Quand, à la fin du XIIIe siècle, le flot tartare se fut retiré des plaines du Bas-Danube, la race roumaine, oubliée parmi tant de bouleversemens, descendit des Carpathes pour fonder successivement les deux principautés de Valachie et de Moldavie. Ainsi se formait, sur une large bande destinée à réunir les pays allemands à la Mer-Noire, un double organisme, l’un finnois et l’autre latin, qui devait résister aux pires vicissitudes de l’histoire, en achevant la séparation durable des Slaves du Nord et des Jougo-Slaves.

Les bassins moyen et inférieur du Danube comportent deux grandes plaines, dont l’une appartient aux Magyars, la seconde aux Roumains. Le brusque coude du fleuve devant Belgrade les réunit en un bloc compact, au milieu duquel se développe la courbe des Carpathes, avec le massif transylvain qui en forme l’épanouissement central. La plaine hongroise s’étend des deux côtés, à la fois ; du Danube et de la Tisza ; au contraire, la plaine valaque n’emprunte que la rive gauche du fleuve, tandis que les falaises de la rive droite servent, jusqu’au Balkan, de soubassement au vaste plateau de la Bulgarie danubienne. Vers la Mer-Noire, la Moldavie remonte en pente douce par les vallées du Pruth et du Séreth, qui sortent côte à côte du groupe montagneux de la Bucowine, détaché des Carpathes vers le Nord-Est. Enfin, du versant septentrional descendent, à travers la plaine galicienne, la Vistule et son affluent, le San, Les plaines hongroise et roumaine, avec le commencement de la plaine polonaise ; la chaîne des Carpathes, les deux massifs de la Transylvanie et de la Bucowine, tel est le domaine que la nature et les circonstances réservent, à l’heure actuelle, comme le plus favorable à l’expansion germanique, pour assurer ses communications avec le Levant.

Le Danube est l’artère vitale du pays hongrois comme du pays roumain. Une fois sorti, en amont de Pesth, des derniers contreforts qui rejoignent les Carpathes au système des Alpes, il s’élargit à mesure qu’il pénètre dans la plaine ; son cours,