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POUR LE CENTENAIRE
D’AUGUSTE COMTE

Auguste Comte, — qui l’eût pu croire ? — est à la mode. On célébrait hier son centenaire. Son monument s’élevait à deux pas de cette Sorbonne, dont les « titulaires » de philosophie l’ont si longtemps attaqué, méconnu, raillé même. Un ministre de la Guerre « se mobilisait » pour faire l’éloge de ce pacifique. C’est le moment de reparler de lui. Puisque, selon le mot de l’un de ses plus illustres disciples, « nous oublions trop souvent, non seulement qu’il y a une âme de bonté dans les choses mauvaises, mais aussi qu’il y a une âme de vérité dans les choses fausses[1], » c’est le moment de nous en souvenir. Non contens de le commémorer, puisqu’on se dispute Auguste Comte, c’est le moment d’intervenir au partage de ses idées. Cherchons donc « l’âme de vérité » qu’enferme le positivisme ; et, pour la découvrir, au lieu de recommencer une analyse vingt fois déjà faite, distinguons d’abord trois choses dans l’œuvre du maître : une partie négative, ou critique ; — une méthode ; — et une partie dogmatique, ou, si je l’ose dire, « constructive. »

On ne saurait d’ailleurs étudier de trop près, ou sous assez d’aspects différens ni trop diligemment, le penseur dont l’influence, depuis un demi-siècle, s’est partout fait sentir, à l’étranger, dans le monde entier, non moins profondément qu’en France, aux États-Unis comme en Italie, au Brésil comme en

  1. Herbert Spencer, Premiers principes ; traduction française, p. 1.