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qui arrivera lorsqu’un nouveau décret du 24 novembre sera venu réjouir les amis de la liberté ? Aujourd’hui, en présence du gouvernement, se déploie une coalition qui crie : « Liberté ! » Mais tous sont loin d’y attacher le même sens et surtout d’avoir des intentions identiques. (Mouvemens divers.) Il en est qui demandent la liberté parce qu’ils la considèrent comme le moyen le plus efficace de fortifier le gouvernement ; il en est qui la désirent parce qu’ils l’estiment l’arme la meilleure pour le renverser. (Rires approbatifs sur un grand nombre de bancs.) Tout cela est bien connu ; cependant, tant que rien n’aura été obtenu, cette coalition ira sans cesse en grossissant ; successivement tous les hommes attachés aux principes libéraux s’y enrôleront et il en résultera tôt ou tard une force impuissante pour édifier, mais toute-puissante, sinon pour détruire, du moins pour embarrasser et arrêter.

(c Supposez, au contraire, le couronnement de l’édifice opéré ; à l’instant cette coalition se dissout et se divise en deux groupes distincts : ceux qui estiment le bien irréalisable en dehors d’une certaine forme de gouvernement, toujours hostiles ; ceux qui pensent que la question de gouvernement est d’un intérêt secondaire, que ce qui importe, ce sont les institutions fondamentales et les œuvres populaires, ceux-là, en restant indépendans, devenus favorables. Mais il y aura entre les deux groupes cette différence que le premier ne comptera presque personne, tandis que la nation entière sera derrière le second. (Très bien ! Très bien ! ) Aussitôt il se formera en faveur du gouvernement une coalition semblable à celle qui existe en ce moment contre lui.

« Le jour où le Souverain entrera dans la voie libérale politique, avec autant de décision qu’il y est entré dans l’ordre civil et social, ce jour-là je ne serai pas du premier groupe, mais du second ; je ne serai pas hostile, je serai favorable. Je n’hésite pas à le déclarer hautement dès aujourd’hui, mon vœu le plus sincère, mon vœu le plus ardent, est que le gouvernement de l’Empereur se consolide par la liberté. (Bravos répétés sur un grand nombre de bancs.)

« Le meilleur gouvernement est celui qui existe, dès que la nation l’a accepté. (Très bien ! très bien !) ‘Et la raison profonde qui m’a entraîné dans ce sentiment est que, lorsqu’on subordonne le progrès à une forme de gouvernement déterminée qui n’existe pas, on est obligé, fût-on l’esprit le plus modéré, d’avoir recours aux