Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 7.djvu/957

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

communication exerce-t-elle entre l’une et l’autre une intervention morale ? Le gouvernement néerlandais ne fait pas autre chose. Aussi, sommes-nous convaincus que le gouvernement anglais n’aurait pas hésité à accepter ses bons offices, dans la forme où il les offrait, s’il y avait vu quelque intérêt pour lui. Il était en présence d’une suggestion qui ménageait avec soin toutes les convenances : malheureusement elle dérangeait les idées qu’il s’était faites, tant sur les personnes qui devaient entrer en négociations, que sur le lieu où celles-ci devaient s’engager. C’est pour ce dernier motif, et non pas pour un autre, qu’il a décliné les offres du gouvernement néerlandais.

Il faut convenir d’ailleurs que, si la note néerlandaise était, à quelques égards, très habile, elle prêtait, sous d’autres rapports, à des objections que le gouvernement anglais devait inévitablement lui faire, et qu’il lui a faites en effet tout, de suite. Après avoir sommairement analysé le document qui lui avait été remis, il en a tiré la conclusion que le gouvernement de la reine avait agi sous sa seule responsabilité, « et sans l’autorisation des délégués des chefs boers. » Il était d’autant plus en droit de le faire que ceux-ci, aussitôt la démarche publiée, s’étaient empressés de faire dire dans les journaux qu’ils n’y étaient absolument pour rien. Le croira qui voudra. M. Kuyper est certainement trop avisé pour avoir lancé sa note sans s’être assuré des dispositions des délégués boers. Nous ne doutons pas qu’il ne fût d’accord avec eux, et lord Lansdowne n’en doute probablement pas davantage ; mais rien ne l’obligeait d’en convenir, puisqu’on lui disait le contraire. On comprend que le gouvernement néerlandais ait pris pour lui seul la responsabilité de sa démarche et ait déclaré qu’elle était toute spontanée ; on ne comprend pas moins que les délégués boers aient consacré une fiction qui devait, en cas d’échec, leur permettre de dire qu’ils n’en étaient pas atteints. Mais s’il y avait à cela des avantages, il y avait aussi un inconvénient : l’autorité de la démarche hollandaise en était sensiblement affaiblie. Eh quoi ! M. Kuyper, à supposer que le gouvernement anglais se montrât prêt à accorder les sauf-conduits demandés, ne pouvait même pas dire si les délégués boers consentiraient à les accepter ? Il est naturel que le gouvernement anglais, quand même il n’aurait pas eu d’autres raisons de s’en abstenir, n’ait pas voulu entrer dans une voie qui aurait pu être une impasse. Il a mis à son tour quelque discrétion à ne pas insister : il s’est contenté de prendre acte du fait que le gouvernement de La Haye avait agi sans entente préalable avec les principaux intéressés. Un autre point, dans la note néerlandaise, devait prêter à des critiques. « Il ne