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Fancan n’était pas un isolé dans l’entourage de l’évêque et de Marie de Médicis. Il était étroitement lié avec toute la bande des praticiens de l’intrigue et des spéculateurs en mécontentement qui s’attachaient à la cause de la Reine-Mère. Succédant aux Tantucci et aux Rucollaï, il rencontrait là les Chanteloube, les Marcel, les Mathieu de Morgues. Une lettre de celui-ci nous montre bien quels genres de services on pouvait attendre de ces gens : ils répétaient les nouvelles, forgeaient les épigrammes, insinuaient les calomnies, espionnaient, colportaient, rapportaient, hommes à toutes besognes et à toutes mains, se répandant, selon leurs propres expressions, « en beaucoup de visites chez des personnes considérables, pour donner de bonnes impressions et effacer les mauvaises que d’autres avaient données. » C’est ce qu’on appelait, dès lors, des mouches, espèces bourdonnantes et malfaisantes qui se croyaient nécessaires et que l’on croyait utiles, parce « pie, dans ces temps-là, tout, même les grandes choses, se préparait dans l’intrigue du cabinet.

Il est incontestable que ce Fancan pénétra très avant dans la familiarité, sinon dans la continuée, de l’évêque de Luçon. Ses compagnons, qui avaient intérêt à compromettre Richelieu, ont dit, par la suite, qu’il avait écrit ses principaux pamphlets sous l’inspiration directe de celui-ci. Mais l’idée protestante y est trop évidente pour que cette assertion puisse être reçue sans contrôle. Fancan était auprès de Richelieu, cela est certain. Il avait, avec lui, une liberté de langage qui indique d’étroites et intimes relations, voilà tout ce que l’on peut dire.

De ces rapports intimes, il nous reste une preuve d’une authenticité incontestable, dans une lettre écrite à Richelieu, en août 1621, lettre que l’on a attribuée à un autre confident de Richelieu, le l’ère Joseph, et qu’on peut, sans risque d’erreur, restituer, comme l’a l’ait M. Fagniez, à notre Fancan. Ce sont des conseils donnés de haut, par un politique raffiné, à une ambition dont tous les calculs et toutes les inquiétudes sont devinés et ménagés sous les formes d’une apparente rudesse : « Souvenez-vous donc, s’il vous plaît, que le bien des affaires de la Reine consiste, pour l’heure, en rétablissement d’une vie privée et au mépris des tracas de la Cour… Ne demandez rien au Roi pour votre fait particulier, mais importunez-le librement en ce qui regardera les nécessités de la Reine sa mère… Surtout, montrez discrètement que vous n’êtes de facile croyance à toutes