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dramatiques, » il fut interdit à tous ses membres de faire représenter aucun ouvrage sur un théâtre qui n’aurait pas traité avec la commission à laquelle était dévolu le pouvoir exécutif. Il leur fut également défendu de consentir privément à aucune administration théâtrale des conditions inférieures à celles fixées par les tarifs généraux. Enfin toute collaboration fut prohibée avec les directeurs ou employés du théâtre sur lequel la pièce devait être montée. Cette dernière clause a pour objet d’empêcher les directeurs trop avides de reprendre, sous couleur d’une collaboration imaginaire aux pièces qu’ils acceptent, une partie des droits qui appartiennent légitimement aux auteurs.

Ces clauses, objecte-t-on, ne gênent que les imprésarios honnêtes ; les autres usent de prête-noms pour atteindre le même but : certains débutans se laissent volontiers juguler par des directeurs indélicats ; ils subissent des collaborateurs factices et, s’ils sont riches, vont jusqu’à donner de l’argent pour être joués. Il n’est pas moins vrai que la règle, fût-elle violée parfois, est le plus souvent observée ; la Société, lorsqu’elle vient à en avoir la preuve, punit avec rigueur les infractions : elle frappait, l’an dernier, de 12 500 francs d’amende le directeur d’une des scènes du boulevard, pour avoir indûment louché des droits dans son théâtre. Les tarifs uniformes qu’elle impose profitent à la moyenne des auteurs ; ils font payer les gros pour les petits. Les dramaturges célèbres pourraient exiger sans doute davantage ; le plus grand nombre des littérateurs n’obtiendrait jamais autant.

La quotité de ces droits a augmenté, en effet, en même temps que s’accroissait leur rendement proportionnel : voici un demi-siècle, les salles consacrées au vaudeville payaient seules 12 pour 100 de la recette brute ; les petits théâtres avaient passé des marchés insignifians. Le Théâtre-Français et l’Opéra-Comique versaient 8 pour 100. Quant à l’Opéra, il ne devait, aux ouvrages en trois actes et au-dessus, que 500 francs pour chacune des quarante premières représentations et 100 francs seulement pour les suivantes. Les scènes de province, suivant une division en cinq classes, qui datait de 1791, étaient soumises aussi à des taxes fixes, qui variaient de 30 francs, pour Lyon, Bordeaux ou Marseille, jusqu’à 2 francs pour la cinquième catégorie. Les prélèvemens fixes ont depuis lors disparu à peu près partout. Les théâtres des départemens sont aujourd’hui astreints à 6 pour 100 de leur recette, et le produit de ce droit, presque