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chemin de fer qui atteignait déjà Aïn-Sefra. Ce fut désormais le programme adopté ; mais il ne fut exécuté qu’avec une lenteur et des hésitations qui plusieurs fois manquèrent d’en compromettre le succès. L’occupation, en 1885, de Djenien-bou-Reszg marqua notre volonté de franchir les montagnes et de rejoindre, par la vallée de l’oued Dermel, celle de l’oued Zousfana. Les gens des oasis, très émus à cette nouvelle, se plaignirent au sultan et la crainte de complications diplomatiques nous fit interrompre les travaux. En ces dernières années, heureusement, notre action dans le Sud-oranais a été plus énergique et moins décousue. Le 1er février 1900, M. Laferrière inaugurait la ligue d’Aïn-Sefra à Djenien-bou-Reszg, construite à travers les massifs du Djebel-Amour et les gorges sauvages de Moghrar ; nous avions mis huit ans pour achever 88 kilomètres de voie ferrée ! Mais enfin, un grand résultat était obtenu : l’Atlas saharien était franchi ; et, de cette station de Djenien-bou-Reszg qui, comme le disait le gouverneur général dans son discours d’inauguration, était « à la fois un terminus et une tête de ligne, » nos rails allaient pouvoir, peu de mois après, gagner facilement Duveyrier, d’où bientôt ils rejoindront la route naturelle de l’oued Zousfana. Il était démontré enfin que l’obstacle de Figuig n’arrêterait pas notre expansion.

Les gens de Figuig, dès qu’ils eurent compris que nous étions décidés à pousser vers le sud notre voie ferrée, commencèrent à s’apprivoiser, et bientôt quelques relations commerciales s’établirent entre nos postes et les oasis. En même temps, de discrètes avances, esquissées, pour se rapprocher de nous, par notre vieil adversaire de 1882, Bou-Amama, révélaient l’accroissement du prestige et de l’influence de la France dans la région. Réfugié d’abord à Figuig, après l’insurrection de 1882, puis à Deldoun, dans le Gourara, il est revenu de nouveau près de son lieu natal d’El-Hammam-Tahtani, l’un des ksour de Figuig : c’est de là qu’avec précautions et réticences, il chercha à s’aboucher avec les autorités françaises et qu’il fit parvenir, à plusieurs reprises, au gouvernement de l’Algérie, des demandes d’aman. En novembre 1899, il reçut, pour lui et sa tente, le pardon sollicité. Mais Bou-Amama n’est pas un Abd-el-Kader ou un Si-Sliman ; bien qu’issu de la grande tribu maraboutique des Ouled-Sidi-Cheikh, il n’est pas, par sa naissance et sa fortune, un personnage assez considérable pour servir avec éclat la France après l’avoir