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on put voir les ravages produits dans cette masse de cavaliers. « C’est superbe, mais ce n’est pas la guerre, c’est de la folie ! » s’écria le général Bosquet.

Ce fut l’entrée en ligne de la batterie d’artillerie française du capitaine Thomas, mort général, combinée avec une charge opportune des chasseurs d’Afrique, du général d’Allonville, prenant en flanc la batterie russe, établie sur les monts Fedioukine, qui dégagea la cavalerie anglaise. Après le ralliement, la brigade de lord Cardigan ne comptait plus que 197 hommes montés. Il n’en restait que 10 dans un des régimens de dragons légers. Plus de 350 cavaliers étaient restés sur le champ de bataille.

Cependant, il ne s’agissait alors que d’affronter le feu des fusils lisses et des canons se chargeant lentement par la bouche.

Que penser alors des attaques de cavalerie menées en 1870 contre des troupes armées de fusils à tir rapide et de canons se chargeant par la culasse ? Mais le moment n’est pas encore venu d’envisager cette question. Il est nécessaire d’examiner d’abord comment la cavalerie fut employée par une nation qui, n’ayant pas de préjugés ni de savantes doctrines, apprenait la guerre en la pratiquant et ne faisait appel qu’à son bon sens. Il s’agit de la guerre de Sécession qui mit aux prises les forces confédérées des États-Unis du Sud avec les armées fédérales du Nord.

Cette guerre ouvrait à la cavalerie des horizons nouveaux. Les Américains, libres des entraves que la routine impose aux vieilles armées européennes, adoptaient les procédés qui convenaient le mieux à leurs opérations.

Les armées du Nord comme celles du Sud durent utiliser les chemins de fer comme organes essentiels de leurs mouvemens. La cavalerie devenait la plus redoutable ennemie de la locomotive et dès lors apparaissait ainsi le principe essentiel de la guerre de l’avenir. Cependant, en Europe, il passa presque inaperçu. Les différentes opérations de cavalerie furent confondues sous le nom de « raids » impliquant l’idée de grandes chevauchées ayant principalement pour but la destruction des magasins de l’adversaire.

Il fut professoralement déclaré que de telles opérations ne pouvaient avoir aucune application dans une guerre européenne ; elles ne furent dès lors étudiées que superficiellement et avec