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et en atomes. La théorie cinétique fait comprendre la constitution des gaz et les effets de la chaleur à la condition d’imaginer ces particules animées de vifs mouvemens de rotation et de déplacement. La théorie des ondulations fait sortir l’explication des phénomènes lumineux des mouvemens vibratoires particuliers d’un agent spécial : l’éther. Mais, ce ne sont là que des hypothèses ; elles n’ont rien de nécessaire. Ce sont des images des choses ; ce ne sont pas les choses elles-mêmes.

Ici, il ne s’agit point d’hypothèses. Cette agitation intestine, ce travail intérieur, cette activité incessante de la matière, ce sont des faits positifs, c’est une réalité objective. Il est véritable que les corps dérangés de leur équilibre mécanique ou chimique ne le reprennent que plus ou moins lentement. Dans un milieu déterminé et fixe, il leur faut quelquefois des jours et des années pour l’atteindre. A peine y sont-ils arrivés et entrent-ils dans ce repos relatif qu’ils en sont aussitôt dérangés, car le milieu lui-même n’est pas fixe ; il éprouve des variations qui retentissent à leur tour sur le corps considéré ; et ce n’est qu’au bout de ces variations, à la fin des temps, qu’ils atteindront ensemble, dans l’uniformité universelle, un éternel repos.

Nous allons voir que les alliages métalliques éprouvent des changemens physiques et chimiques continuels : ils sont toujours à la recherche d’un équilibre plus ou moins fuyant. Les physiciens, dans ces dernières années, ont appliqué leur attention à ce travail des corps matériels à la poursuite de la stabilité. Wiedemann, Warburg, Tomlinson, à l’étranger ; MM. Duguet, Brillouin, Duhem et Bouasse, en France, ont repris les anciennes études expérimentales de Coulomb et de Wertheim, sur l’élasticité des corps, sur les effets de la torsion, de la traction, de l’écrouissage des métaux, de la trempe et du recuit.

L’activité intestine qui se manifeste dans ces circonstances présente des caractères tout à fait remarquables, que l’on n’a pu s’empêcher de comparer aux phénomènes analogues offerts par les corps vivans. On a ainsi créé, en physique même, une terminologie et des expressions imagées, qui sont empruntées à la biologie.

C’est lord Kelvin qui a parlé le premier de la fatigue des métaux ou de la fatigue d’élasticité ; et, depuis, Bose a fait connaître pour ces mêmes corps la fatigue du tact électrique. Le terme d’accommodation a été employé dans l’étude de la torsion, et précisément pour des phénomènes qui sont inverses de ceux de la fatigue. On a considéré comme faits d’adaptation ceux que présente le verre soumis à une