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même après le refus d’autorisation prononcé par la Chambre, et on aurait tort de lui attribuer un caractère tout platonique. C’est sans doute pour cela que la commission de la Chambre fait de si grands efforts en vue de supprimer le Sénat. Aux dernières nouvelles, elle revenait à l’idée de forcer la main au Conseil d’État. Elle hésite sur la marche à suivre, mais non pas sur le but à atteindre.

Nous raisonnons d’ailleurs, ou plutôt nous argumentons en théorie et pour l’honneur des principes : il est, en effet, peu probable que les congrégations trouvent actuellement une humeur plus clémente au Sénat qu’à la Chambre. Tous les orateurs qui y ont pris la parole dans ces derniers temps se sont déclarés partisans de la liberté d’enseignement, et l’un d’eux l’a même fait avec un éclat, c’est M. Clemenceau : mais ils ont tous ajouté, et M. Clemenceau tout le premier, qu’il fallait commencer par dissoudre les congrégations. Sus aux congrégations ! est le mot d’ordre. Nous ne savons pas si les quatre ou cinq d’entre elles que le gouvernement propose de sauver survivront au vote de la Chambre : si elles y survivent, elles passeront un mauvais quart d’heure au Sénat.


En ce qui touche la liberté d’enseignement, cette liberté que tout le monde professe du bout des lèvres, sauf à supprimer tous ceux qui se sont permis d’en user jusqu’ici, M. le ministre de l’Instruction publique a déposé un projet de loi. Il serait prématuré d’en parler dès aujourd’hui d’une manière complète ; nous aurons l’occasion de l’étudier de plus près lorsqu’il sera discuté par le Sénat, car c’est au Sénat qu’il a été présenté en premier lieu. On a trouvé, non sans raison, que l’autre Chambre avait assez d’affaires sur les bras. Le projet de M. Chaumié est né de la clameur qui s’est élevée dans le camp radical socialiste contre la loi Falloux. Le gouvernement s’est cru obligé de supprimer ce qui reste de cette loi : comme il n’en reste rien qu’il ne faille reprendre à peu près dans les mêmes termes et remettre sur pied, cet exercice n’a pas dû le fatiguer beaucoup. Nous parlons dans l’hypothèse où le gouvernement est, comme il le dit, partisan de la liberté de l’enseignement. Dès lors, la loi Falloux, réduite à ses proportions actuelles, n’avait pas grand’chose à craindre de lui. Mais peut-être avons-nous tort de tenir ce langage ; peut-être vaudrait-il mieux, pour causer quelque satisfaction aux radicaux socialistes et désarmer leurs colères, déclarer que cette fois la loi Falloux est bien frappée à mort et que les derniers vestiges vont en disparaître. Nous aimons mieux parler sincèrement. Il n’y a que deux