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législateur n’ait pas cru pouvoir approprier à ce nouveau service les institutions déjà établies pour les autres assurances sociales. Il eût été difficile, à la vérité, d’en charger les caisses de maladie, qui constituent déjà cinq types distincts et n’ont aucun lien et aucune corrélation entre elles, mais il semblait naturel de confier l’assurance sur l’invalidité et la vieillesse aux corporations légalement organisées pour l’exécution de la loi sur les accidens. Chacune de ces grandes Mutuelles patronales constitue une caisse autonome, alimentée par des primes ou cotisations d’assurances payées par les patrons, et à charge de servir aux ouvriers la rente à laquelle ils ont droit. Ces caisses sont administrées par un bureau de direction, composé de patrons, et par une assemblée générale. Avec quelques modifications, elles se fussent parfaitement prêtées à ce nouveau service. Au Reichstag, on a donné pour raison que ces corporations étaient trop nombreuses (il y en a 65 pour l’industrie et 48 pour l’agriculture) ; que quelques-unes d’entre elles n’avaient pas assez de surface pour permettre une large répartition des risques d’invalidité ; et que certaines industries, exposant les ouvriers à une invalidité plus précoce, nécessitent des coefficiens de risques différens. Beaucoup de ces objections s’appliquent du reste aux établissemens d’assurances, qui sont, au point de vue du nombre des adhérens et de la fortune, dans des conditions d’inégalité flagrante, exigeant l’intervention du législateur. Peut-être faut-il chercher la raison déterminante de cette décision dans des susceptibilités de politique locale.

La loi de 1889 a donc créé des caisses régionales ou établissemens d’assurance, suivant le terme consacré, ayant droit de percevoir toutes les cotisations d’assurances de leur ressort, de les faire fructifier librement, et ayant en retour l’obligation de servir les rentes. C’est un troisième organisme, fonctionnant indépendamment des deux autres ; mais cette diversité ne paraît pas gêner les Allemands. Ces établissemens d’assurances régionaux ne sont pas des caisses d’Etat administrées par des fonctionnaires, mais des caisses autonomes administrées par les patrons et les assurés eux-mêmes sous le contrôle et la direction de fonctionnaires publics : ils ont toute la liberté compatible avec l’intérêt de l’Empire et des États confédérés. Ils sont au nombre de 30. La loi laisse subsister à côté d’eux les caisses de retraites ouvrières existant déjà dans certaines grandes administrations et