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Les inondations périodiques du Tchad sont ainsi reconnues par tous les explorateurs ; elles s’étendent sur toutes les rives du lac ; celles des cours d’eau divers de la région sont aussi très importantes. On sait, d’ailleurs, que de récentes explorations font penser que, aux époques de hautes eaux, la Logone, bras du Chari, peut rejoindre la Bénoué. L’Afrique centrale soudanaise reproduit ainsi le phénomène des inondations du Nil, peut-être même dans des proportions plus vastes.

En s’en tenant à la région propre du Tchad, quelle peut être l’étendue des surfaces submergées par le lac aux hautes eaux ? Il est impossible de le dire ; d’après le seul voyageur qui ait fait des séjours prolongés et en diverses saisons sur les rives du lac, Barth, elle serait énorme. Si l’on s’en tenait aux écarts d’évaluation de la surface du lac par les différens explorateurs ou géographes cités plus haut, on pourrait admettre que les inondations du Tchad couvrent une surface d’une vingtaine de mille kilomètres carrés ou de 2 millions d’hectares, égale à toute la surface cultivée de l’Égypte. D’après les statistiques britanniques, en effet, l’étendue des terres cultivées en Égypte, dans l’année 1891, était de 51 022 000 feddans, et le feddan égale 1,03 acre anglais[1], lequel lui-même correspond à 40 ares, ce qui donne 2 015 000 hectares environ pour toute la superficie des terres égyptiennes en culture. Il se peut, toutefois, que les superficies soumises aux inondations périodiques du Tchad soient moindres. M. Foureau, dans la région nord et nord-est, la moins favorisée, correspondant au Kanem, plaçait à quelques kilomètres seulement la limite des terres submersibles ; mais, d’autre part, comme le prouvent les passages que nous avons cités, le Tchad, quand il le contourna dans une marche rapide, en janvier et février, était très loin d’être revenu à son niveau minimum, et, dans la région sud-orientale, les indigènes estimaient à 60 kilomètres la zone d’inondation. Il paraît donc très modéré d’évaluer à 1 million d’hectares ou 10 000 kilomètres carrés les superficies inondées lors des fortes crues ; ce chiffre, tout au moins, doit être considérablement accru, si l’on tient compte des inondations des cours d’eau qui se jettent dans le Tchad : Komadougou, Chari, Logone, etc.

Des inondations périodiques d’eau douce sous un climat

  1. The Statesman’s Yearbook, 1901, p. 1, 163.