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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 octobre.


Lorsque M. Combes a pris possession du ministère, il a modestement déclaré que sa tâche se bornerait à l’application de la loi sur les associations. Évidemment, il ne prévoyait pas alors la grève générale. Il avait paru croire que le monde cesserait de tourner parce qu’il était ministre : cette illusion commence peut-être à se dissiper. Nous avions averti M. Combes que, quelle que fût sa bonne volonté de réduire son rôle à sa plus simple expression, les événemens l’obligeraient à sortir du cadre étroit où il s’était enfermé : la vie générale continuerait d’évoluer autour de lui. Depuis quelque temps, un silence relatif s’était fait dans le monde du travail. Toutefois, on sentait bien qu’il n’y avait là qu’une trêve, et que le mouvement qui avait déjà failli tout emporter l’année dernière n’était que suspendu. Pourquoi en aurait-il été autrement ? Les ouvriers étaient soumis aux mêmes excitations violentes que par le passé. Ils avaient plus de confiance encore dans la faiblesse du gouvernement actuel que dans celle de son prédécesseur. Il fallait s’attendre à tout.

On sait comment la chose est venue. Un congrès général, tenu à Commentry, a décidé qu’il y avait lieu de proclamer la grève générale, et a laissé au Comité national des mineurs le soin de rendre sa décision effective. Jusque-là rien de bien nouveau. Nous avions déjà une certaine habitude de voir les congrès ouvriers jouer avec la grève générale ; mais le Comité national, qui est en quelque sorte leur pouvoir exécutif, avait toujours trouvé le moyen d’éluder la difficulté, car il ne se dissimulait pas que la grève générale était une périlleuse aventure, et que, s’il fallait menacer toujours le monde capitaliste d’y recourir, comme à une ressource suprême, il serait