Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 11.djvu/922

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des actes les plus manifestes de la vitalité, mouvement, sécrétion, production de la chaleur : le fonctionnement s’arrête, s’il est suspendu : il y a mort apparente ou vie latente. Mais il y a mort réelle, si c’est l’assimilation véritable qui est supprimée.

Il y aurait, d’après cela, une distinction fondamentale entre la mort réelle et la mort apparente. C’est une question qui a été fort controversée, à propos de la durée de conservation des graines dans les tombeaux égyptiens ; à propos encore, des animaux hibernans et des êtres reviviscens, et, en général, de ce qu’on a appelé l’état de vie latente. Mais, au point de vue pratique, il est extrêmement difficile d’appliquer la règle et de décider si les phénomènes qui sont arrêtés dans la graine à maturité, dans le tardigrade de Leuwenhoek, dans l’anguillule desséchée de Baker et Spallanzani, dans le kolpode enkysté qu’une goutte d’eau tiède va faire revivre, sont dus à l’arrêt de la fabrication et de l’utilisation des matériaux de réserve, ou à l’arrêt de l’assimilation protoplasmique. Celle-ci, qui est déjà fort restreinte chez les êtres en condition normale, dont la croissance est terminée, peut tomber à un degré infime chez l’être qui, ne fonctionnant pas, n’use rien. De telle sorte qu’en définitive, pour trancher la question, l’expérimentateur qui mesure la valeur des échanges entre l’être et le milieu, n’a guère à décider qu’entre peu et rien. De là son embarras. Mais, si l’expérience hésite, la doctrine affirme : elle admet que le mouvement d’assimilation protoplasmique, signe essentiel de la vitalité, ne subit ni arrêt ni reprise, mais suit une marche continue.

C’est à la lumière de ces principes qu’il faut apprécier les controverses relatives à la survie des graines. On a admis d’abord que la vie y est absolument suspendue ; que le grain de blé, par exemple, est resté parfaitement inerte depuis le moment où il fut mis dans le silo romain ou l’hypogée égyptien ; puis on professa, avec MM. van Tieghem et Bonnier, en 1882, que la vie est seulement atténuée et ralentie ; puis, de nouveau, avec Koch en 1890, et C. de Candolle en 1895, que l’arrêt vital est absolu. Suivant A. Gautier, la graine conservée et le rotifère desséché ne vivent réellement pas ; ce sont des horloges montées, prêtes à marquer l’heure, mais qui attendent, dans un repos absolu, la première vibration qui les mettra en branle. Pour la graine, c’est l’air, la chaleur, l’humidité qui apportent ce premier ébranlement. En d’autres termes, il y a une organisation propre à la