Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 11.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de fer roule, et Ferryville, une cité de près de 5 000 habitans, aligne ses maisons neuves. Tout est sorti de terre comme par magie, tout s’est transfiguré sous l’effort du travail humain.

La position choisie pour y créer un grand arsenal maritime ne pouvait guère être meilleure. A plus de quinze kilomètres de la mer, les ateliers et les magasins n’auraient rien à redouter des projectiles d’une flotte ennemie ; la profondeur du lac permettait aux gros bâtimens d’arriver jusqu’à proximité de la côte ; la butte de Sidi-Yaya, haute de 77 mètres, offrait des carrières de pierre ; enfin, l’étendue de la plaine permettait aux établissemens de la marine de s’étendre sans ménager l’espace. Les premières études rapidement achevées, les plans faits, l’on se mit à l’œuvre. Depuis trois ans, sous l’impulsion énergique de l’amiral Ponty et de MM. les ingénieurs Pavillier et Boulle, directeur et sous-directeur des travaux publics de la Régence, le travail a marché avec une étonnante rapidité.

Draguer, le long du rivage, quelques hectares trop peu profonds était la première œuvre à faire ; il fallait ensuite construire des digues pour abriter le port, car le lac est si vaste que les coups de vent n’y sont pas sans danger ; depuis la pointe d’El-Caïd, l’anse de Sidi-Abdallah a été ainsi transformée en un large bassin que les machines achèvent d’approfondir à dix mètres, ainsi que le chenal qui y conduit. En même temps commençait l’un des travaux essentiels, le creusement d’une forme de radoub ; les plans de l’arsenal en prévoient, pour le moment, trois, dont deux grandes et une plus petite ; la première, malgré les éboulemens, fréquens dans les terres argileuses, est aujourd’hui très avancée : longue de 200 mètres, profonde de 15, elle pourra, en juillet 1903, recevoir les plus grands cuirassés ; une seconde est déjà commencée. — Les terres, retirées de l’énorme excavation, ou draguées dans le bassin, ont servi à niveler tout l’espace environnant et à édifier les quais. Sur l’immense terre-plein, tout un monde d’ateliers et de constructions de tout genre a surgi : quelques-unes sont achevées, d’autres sortent de terre, d’autres sont encore à l’état de projets. Le long de la baie de Sidi-Abdallah, un vaste enclos enfermera l’arsenal proprement dit, les bassins de radoub avec le bâtiment où s’abritent de puissantes machines d’épuisement, les ateliers de réparation pour les canons et les machines, les fonderies, l’usine d’électricité, les magasins a, vivres, en un mot tous les ateliers, tout