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Foureau, si on les compare, pour la partie commune du trajet, à celles de Barth, et si l’on se reporte enfin aux descriptions faites jadis de beaucoup de contrées, ayant pris actuellement un vif essor, comme les hauts plateaux de l’Afrique Australe, les vastes territoires de l’Amérique du Nord entre la province d’Ontario et la Colombie Britannique, les districts australiens à une certaine distance des côtes, on devra juger que ces données sont très réconfortantes.

Non seulement la mission Foureau-Lamy a pu traverser ces 2 500 kilomètres sans quasi perdre d’hommes, sans que son nombreux effectif fût atteint de maladies, mais elle a presque tout le long de la route rencontré des points d’eau, malgré l’incurie des indigènes, parfois même des eaux assez abondantes, des pâturages naturels, sinon tout à fait continus, du moins s’étendant le long de la majeure partie du trajet et ne laissant que des lacunes possibles à franchir ; des essences arbustives robustes ayant des représentans sur toute cette surface immense ; des troupeaux maigres et d’un nombre restreint de têtes, mais se trouvant quasi dans tous les districts, un ou deux exceptés, de cette vaste solitude.

Bref, à la lecture attentive et réfléchie de ces pages, l’idée traditionnelle que l’on se faisait du désert et du Sahara en particulier, disparaît ; ce n’est pas une immensité de sables mouvans, sans aucune pluie, sans aucune eau, sans aucune végétation, sans possibilité aucune de vie humaine ou animale. C’est une région variée, où les ressources élémentaires ne font pas, en général, défaut et qui a le mérite, non négligeable, d’être l’une des plus salubres du globe.

Le commandant Reibell, dans son rapport d’ensemble sur l’escorte de la mission saharienne, résume bien les difficultés principales qu’a rencontrées l’expédition. « De fait, le désert put accumuler les obstacles, sans que jamais le mouvement en avant de la mission en fût enrayé ; mais, à partir du jour où elle se heurta à la sourde obstruction et au fanatisme des Touareg de l’Air, elle ne put se frayer un chemin, dans un pays relativement facile, qu’au prix de luttes incessantes et de fatigues inouïes[1]. » Ainsi, ce n’est pas la nature des lieux, c’est la nature des hommes qui retarda le passage de la mission et lui causa des angoisses.

  1. Mission saharienne, Appendice, p. 806.