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ouvriers du fond et du jour réunis, entre 900 et 1 100 kilos, d’une part, entre 530 et 830 kilos, de l’autre ; et c’est une production annuelle variant, par conséquent, de 230 à 300 tonnes pour les ouvriers du fond, de 150 à 240 tonnes pour tous les ouvriers ensemble.

La variation est sans doute très grande, trop grande pour s’expliquer seulement par les différences personnelles dans la qualité de l’ouvrier et les différences locales dans la qualité du gisement. Il faut, en effet, pour l’expliquer complètement, y faire entrer, il faut compter parmi ses causes, « le plus ou moins de perfectionnemens apportés dans les procédés d’extraction, » le plus ou moins de force « des machines destinées à épuiser l’eau, à ventiler les galeries, à monter les bennes… etc., soit que ces machines aident directement l’ouvrier, soit qu’elles contribuent à assainir ou à rendre plus sûr le milieu où il opère[1] ; » parce qu’en améliorant plus ou moins ainsi les conditions du milieu, on améliore plus ou moins les conditions du travail et, par suite, on en augmente plus ou moins le rendement.

Quelles qu’en soient du reste les raisons, et quelque part que chacune d’elles y ait eue, la production des mines, la productivité du mineur, s’est accrue en un siècle, dans la proportion du simple au double, au triple, parfois au quadruple ou même au quintuple. A Anzin, vers 1775, elle ne dépassait pas annuellement 60 tonnes ; en 1873, elle avait atteint 192 tonnes. A Aniche, vers la même date de 1775 ou quelques années après, elle n’était que de 38 tonnes ; et, en 1873, elle approchait de 220 tonnes. Dans les mines du bassin de la Loire, autour de Saint-Etienne, à Chaney et Saint-Jean-Bonnefonds, à Roche-la-Molière et Villars, à Firminy, 35 pics ou piqueurs s’employaient, en 1709, à l’abatage du charbon : un pic rendait en moyenne par jour douze charges de 125 kilogrammes, ou 1 500 kilos, une tonne et demie, — ce qui faisait, pour 230 jours environ d’extraction à l’année, 345 tonnes par pic.

Mais disons bien par pic et non par ouvrier : non pas même par ouvrier du fond, toutes spécialités du fond mêlées ou négligées, mais par mineur proprement dit, piqueur, ouvrier à veine. Avec les seules statistiques officielles, qui ne parlent que « d’ouvriers du fond » et d’ « ouvriers sans distinction, » nous

  1. Voyez André Liesse, le Travail, p. 272-273.