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Le premier nous raconte les aventures d’Anne Keroual de Saint-Ives, noble Breton, qui a servi dans l’armée de Napoléon sous le nom de Champdivers. Fait prisonnier par les Anglais en Espagne (mai 1813), il est en captivité au château d’Édimbourg. Il améliore un peu son ordinaire en donnant des leçons de français à un major anglais, Chenevix, officier correct, raide, mais loyal et bienveillant, et en sculptant des objets en bois, que viennent acheter des dames charitables de la ville. Parmi les acheteurs, Champdivers remarque un jour une jeune beauté, aux yeux bleus et à la blonde et luxuriante chevelure. Flora Gilchrist, conduite tantôt pas une vieille tante aux lunettes d’or, tantôt par son frère Ronald. Tout, à première vue, sépare cette jeune fille riche et belle du pauvre prisonnier, à la jaquette jaune, à la figure hirsute une partie de la semaine. Champdivers, néanmoins, conçoit pour elle un violent amour et lui [offre un lion rampant sculpté en bois, comme premier témoignage de ses sentimens. Elle l’accepte. Mais ce succès excite la jalousie de ses camarades de chambrée. L’un d’eux, Goguelat, un vieux grognard, le raille et l’insulte. Il s’ensuit un duel pendant la nuit, dans l’intervalle de deux rondes de gardiens; pour toute épée,ils se servent de deux moitiés d’une paire de ciseaux fixées au bout de bâtons. Goguelat tombe atteint d’une blessure mortelle et, quand les gardiens en arrivant le trouvent baignant dans son sang, il déclare qu’il s’est suicidé « pour ne plus voir tant d’habits rouges ! » Sur ces entrefaites, Saint-Ives reçoit, par l’intermédiaire du notaire Romaine, un paquet de billets de banque, de la part d’un oncle, Alain de Keroual, riche grand seigneur émigré en Angleterre avant la Révolution. Bientôt après, les prisonniers ayant pu se procurer une corde assez longue, réussissent à s’évader du château et à s’échapper sauf un seul, Clausel, qui par jalousie dénonce la part de Saint-Ives dans le duel. Cependant, Saint-Ives a réussi à trouver un asile dans le cottage de Swanston, demeure de Flora, qui le cache dans un poulailler. La tante duègne le découvre et, après avoir fait une scène à sa nièce, finit par s’amadouer et donner à Saint-Ives un guide, qui le ramène par des sentiers écartés en Angleterre, où il est en sûreté. En effet, sur la dénonciation de Clausel, on a instruit le procès de Champdivers et il est sous le coup d’un mandat d’amener. Il finit par arriver après quelques incidens au château à’Amersham, où demeure son oncle Alain ; ce dernier ayant