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temps, le départ inopiné d’un ingénieur ordinaire quittant la Compagnie, — le fait n’est pas rare, — peut tout à coup abréger leur stage : en termes du métier, ce sont des roues de rechange. Ils passent alors ingénieurs ordinaires, — et la roue se met à tourner.

Sur cette roue, l’ingénieur ordinaire, s’enroule cette courroie de transmission du Capital au Travail : le chef porion, le porion, le surveillant. Ils retrouvent ici leur place : les officiers de la mine y rejoignent les sous-officiers ; et en eux tous, et par eux tous, le service du fond est au complet.

Le service du jour a dans ses attributions l’étude et la construction des bâtimens de la surface, mais les deux services du fond et du jour sont, par la force des choses, en une telle connexité qu’ils ont beau être administrativement séparés : dans plus d’un cas et sur plus d’un point, ils se touchent et s’impliquent. C’est ainsi que les aménagemens du jour, nécessaires au service du fond, sont faits d’accord avec ce service ; et c’est ainsi qu’en retour, les réparations importantes, même au fond, sont faites par le service du jour. Ce service, celui du jour, n’exige pas moins de cinq ingénieurs, sous les ordres d’un ingénieur en chef : 1° l’ingénieur chef du bureau des études, qui est à l’ingénieur en chef du jour ce que l’ingénieur principal est à l’ingénieur en chef du fond ; 2° l’ingénieur des travaux du jour ; 3° l’ingénieur du chemin de fer de la Compagnie (pour desservir les usines et les fosses : une trentaine de kilomètres de voies) ; 4° l’ingénieur de l’atelier ; 5° l’ingénieur du lavoir et des fours à coke, avec un ingénieur du laboratoire pour les essais et les analyses. A la variété des tâches à remplir correspond la variété des origines de tous ces ingénieurs du jour, selon la compétence spéciale qui leur est demandée : alors que les ingénieurs du fond sortent presque tous de l’Ecole de Saint-Étienne, eux, ils sortent, les uns de l’École centrale, les autres d’une école d’arts et-métiers. Tout au sommet, le directeur, qui unit à la direction de toutes les spécialités du fond, celle de toutes les spécialités du jour, est un polytechnicien. Sous son regard et dans sa main, il tient tout le travail de toute la mine ; et la mine, à présent, dans l’industrie moderne, ce n’est plus seulement un trou d’où l’on tire de la houille.

On sait, par de curieuses estampes, ce qu’était un puits au XVIIIe siècle, et précisément vers la naissance de la grande industrie