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au calcium, dont le poids est 20, par l’addition d’un atome d’un corps hypothétique dont le poids serait 8 ; de là au strontium, dont le poids est de 44, par l’addition à l’atome magnésium de 4 atomes de ce corps hypothétique ; à l’atome du baryum par l’addition de 7 atomes de ce même corps. — En d’autres termes, les métaux seraient formés par l’addition à un certain nombre de radicaux primordiaux — chefs de file des différentes familles naturelles, — d’une même espèce de matière à des degrés différens de condensation. De telle sorte que, pour ramener à l’unité de matière la totalité des corps simples, il ne resterait plus qu’à réduire à une composition commune les chefs des divers groupes chimiques naturels.

Ce système de J.-B. Dumas se heurte au même obstacle que celui de Prout. Il ne peut pas se traduire dans la conception atomique. Il faudrait faire entrer en ligne de compte des fractions d’atomes. L’atome devrait être sécable, divisible en parties plus petites[1].

Le système de J.-B. Dumas est devenu l’origine des systèmes de classification des élémens proposés ultérieurement, en France par Chancourtois, en Angleterre par Newlands, en Allemagne par Lothar Meyer, et en Russie par Mendeleef. Tous, comme celui de Dumas, sont fondés sur la considération de la valeur numérique des poids atomiques ; tous ont pour but de rattacher les unes aux autres, par un lien de parenté, ces soixante-douze ou soixante-quinze substances que l’on ne peut s’habituer à regarder comme entièrement distinctes. Le plus connu de ces systèmes et celui qui s’est montré le plus fécond est celui de Mendeleef. Il est désigné par le nom de loi périodique. En disposant les élémens d’une certaine manière, selon l’ordre de grandeur croissante de leurs poids atomiques, on arrive à faire ressortir des groupemens qui révèlent les intimes relations de parenté de ces corps simples. Leurs propriétés ainsi que les formes et les propriétés de leurs combinaisons sont une fonction périodique de la grandeur du poids atomique. Quelques-unes des

  1. M. Berthelot a fait une autre objection aux vues de Dumas. L’assimilation des séries homologues de la chimie organique aux familles naturelles des corps simples ne serait pas justifiée. Elle rencontrerait un obstacle presque insurmontable dans une des lois fondamentales de la chimie, celle de Dulong et Petit, relative aux chaleurs spécifiques moléculaires. Conformément à la loi, cette chaleur spécifique moléculaire est constante pour les corps simples : au contraire, elle croît comme les poids moléculaires eux-mêmes, dans les séries organiques.