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déjà et augmenteront encore d’une manière notable le chiffre de la dépense ; mais elles étaient commandées par l’intérêt supérieur qui s’attache à l’établissement à Boulogne d’un port de premier ordre, offrant à la marine marchande et à la marine militaire les meilleures conditions d’entrée et de sortie, de ralliement et d’installations ; et, loin de les regretter, on ne saurait que les approuver sous réserve. La jetée d’Ouest ou du large est d’ailleurs entièrement terminée ; elle assure déjà un excellent abri dans la rade et donne au port intérieur le calme qui lui manquait.

Les travaux sont pour le moment un peu ralentis. On doit espérer qu’ils seront repris bientôt avec activité ; et lorsqu’ils seront terminés, Boulogne possédera le plus magnifique, le plus vaste et le plus sûr port d’abri de la Manche et du Pas de Calais. Tous les steamers pourront y relâcher, tous les paquebots pourront y faire leurs opérations de départ et d’arrivée par tous les temps et à toute heure de marée, et le mouvement commercial prendra certainement un développement dont il est difficile de fixer la limite.

La marine militaire considère déjà le port en eau profonde comme un centre de ralliement précieux pour toutes ses escadres. En dehors et au-dessus de toutes les questions de commerce, on conçoit très bien l’intérêt stratégique qu’il pourrait avoir un jour, et il n’est pas besoin de beaucoup insister sur ce sujet. Pour nous Français, descendans des Gallo-Romains, nous ne saurions oublier que deux des plus grands capitaines qui ont un moment conquis presque tout le monde, César et Napoléon, ont considéré Boulogne comme le poste d’observation et le point de départ de toutes les entreprises ayant pour objectif la grande île bretonne, et que deux heures à peine nous en séparent, dans les plus mauvaises conditions de traversée, malgré tous les obstacles et par tous les temps.


CHARLES LENTHERIC.