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l’ampoule, rectilignes, déviables par l’aimant, capables de produire la fluorescence. Ils étaient capables, également, d’impressionner la plaque photographique. Chose remarquable ! ils avaient conservé leur électrisation négative, malgré l’épaisseur de métal qu’ils avaient traversée. C’était un fait inattendu et jusque-là sans exemple. Il signifie que la charge électrique négative est un caractère essentiel et indélébile du rayon cathodique, et que celui-ci ne peut la perdre sans cesser d’exister.

Ces expériences ont appris du même coup que les rayons cathodiques possèdent un pouvoir de pénétration très restreint. Nous ne parlons pas seulement des solides, mais aussi des gaz. A moins que ceux-ci ne soient très raréfiés, les rayons sont rapidement arrêtés et diffusés par les obstacles moléculaires. Au contraire, lorsque le vide est poussé très loin, ils se maintiennent et se conservent sans changement. On a pu les suivre sur une longueur d’un mètre et demi sans constater d’affaiblissement.


Il faut signaler, pour finir, deux autres caractères des rayons cathodiques.

Le premier consiste dans la faculté qu’ils confèrent aux gaz qu’ils traversent de conduire l’électricité. On sait que les gaz secs sont isolans. Un corps électrisé, par exemple un électroscope à feuilles d’or ou un condensateur, y conserve sa charge. S’il paraît quelquefois en être autrement, c’est que le gaz n’est pas sec, et la déperdition doit alors être attribuée à la vapeur d’eau. Mais qu’un rayon cathodique vienne à tomber sur l’air réellement desséché, en contact avec ces appareils, et l’on voit aussitôt ceux-ci se décharger. Le gaz a acquis une certaine conductivité. Cette même propriété appartient, comme nous le dirons tout à l’heure, aux rayons de Röntgen et aux rayons de Becquerel. C’est là un caractère commun à toutes ces radiations, et c’est peut-être, de tous, celui qui se prête le mieux à une investigation rapide et même à des mesures. Aussi est-ce au moyen d’un électroscope maintenu dans une cage remplie d’air sec que l’on fait la recherche de ces diverses radiations. C’est en appliquant ce procédé que M. et Mme Curie ont découvert les nouveaux corps radio-actifs, le polonium, le radium, et M. Debierne, l’actinium[1].

  1. L’étude de ce phénomène peut être différée, sans inconvénient, jusqu’au moment où il sera question des rayons de Becquerel.