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Caisses se laisseraient entraîner ; quant aux chiffres actuels, ils déclarent qu’il n’y a pas à s’y arrêter ; ils se contentent de sourire de leur insignifiance.

En fait, c’est plus de 5 millions et demi prêtés à l’agriculture et 37 millions aux habitations ouvrières. Si on transforme ces chiffres belges en les multipliant par le nombre de notre population, ce serait en France 36 millions de prêts agricoles et 240 millions d’avances pour l’amélioration des logemens. Personne ne jugera ces chiffres insignifians, et nous tiendrions pour singulièrement fécond un tel encouragement donné parmi nous à l’initiative privée.

Entrons un peu plus avant dans le mécanisme de la loi. C’est là seulement que nous pourrons voir les traits qui impriment aux institutions belges un caractère spécial.

D’une manière générale, la Caisse belge ne consent point de prêt direct aux particuliers : entre eux et elle, il y a toujours une Société intermédiaire. Pour la Caisse, c’est une garantie de premier ordre ; à l’emprunteur qui vient la trouver, elle répond : le crédit, c’est la confiance ; je ne sais pas qui vous êtes ; adressez-vous à la société locale qui vous connaît, dont la recommandation sera une caution. S’il s’agit d’un prêt à un cultivateur, il ne sera accordé que sur l’intervention des comptoirs agricoles[1] ; s’il s’agit d’un emprunt sollicité par une des 234 sociétés coopératives de crédit agricole qui se sont fondées depuis 1894, il faut qu’elles soient affiliées à une des 6 caisses centrales existant en Belgique[2]. Les sociétés coopératives sont à double titre les cliens de la Caisse générale ; elles y déposent leurs fonds sur livrets d’épargne ou en compte courant ; ce service leur est ouvert de plein droit, et presque toutes les caisses rurales y recourent ; mais, si elles veulent emprunter, elles doivent se rattacher plus étroitement au patronage d’une des grandes caisses coopératives. Cette organisation n’est pas seulement une sécurité pour l’établissement qui ouvre le crédit, c’est en même temps un lien entre les sociétés, les plus expérimentées soutenant et conseillant les plus jeunes et formant ainsi

  1. Les comptoirs agricoles sont en petit nombre et ont assez médiocrement réussi. La faveur publique s’est portée avec raison sur les sociétés coopératives locales de crédit à responsabilité solidaire et illimitée, du type Raiffeisen.
  2. Les quatre principales sont la Caisse centrale de Crédit agricole, à Louvain, les « Sociétés coopératives centrales de Crédit agricole » du Luxembourg, à Arlon, du Hainaut, à Enghein, et de Liège.