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offensive, afin d’habituer les Français de gré ou de force au système politique gréco-romain implanté chez nous par la Convention. Le Comité de sûreté générale poursuivit les ennemis du dedans, pendant que le Comité de salut public veillait à la défense nationale. De même Fouché peuplera le Temple et Vincennes, tandis que Napoléon occupera Schœnbrunn et l’Escurial.

Lors de l’avènement du Directoire, les gouvernails s’aperçurent bien vite que les mœurs de correspondaient toujours guère aux institutions ; la Terreur détruite, ils voulaient cependant la maintenir sans relever son appareil sanglant : ils créèrent, à côté du ministère tout administratif de l’Intérieur, le ministère de la Police générale (2 janvier 1796), chargé de faire la guerre aux citoyens qui regrettaient le passé comme à ceux qui invoquaient l’appui de l’étranger. Ils n’en tirèrent guère parti, soit parce qu’ils lui donnèrent comme représentais des hommes notoirement au-dessous de leur tâche, soit parce qu’ils opérèrent eux-mêmes, avec la complicité des généraux, la vaste razzia policière du 18 fructidor. L’institution n’acquit son utilité et (pardon du mot) son prestige qu’entre les mains de Fouché, au service de la république consulaire ou impériale.

Sous le régime napoléonien, le ministère de la Police empiéta peu à peu sur les attributions de tous les autres. En 1816, à la veille de sa disparition définitive, Chateaubriand, qui avait eu maille à partir avec lui du temps de l’Empire, le définissait « un monstre né dans la fange révolutionnaire de l’accouplement de l’anarchie et du despotisme ; » puis, faisant surgir derrière son ennemi Decazes, pour l’accabler sous le poids d’une comparaison outrageante, l’ombre de Fouché : « Qu’est-ce qu’un ministre sous un despote ? C’est un homme qui reçoit un ordre, qui le fait exécuter juste ou injuste et qui, dispensé de toute idée, ne connaît que l’arbitraire, n’emploie que la force. »

Chateaubriand ne voyait et ne présentait plus qu’un côté des choses. Le ministre de la Police sous Napoléon est bien le major général de l’armée chargée de maintenir la paix publique ; il dirige, concurremment avec le ministre de l’Intérieur, le département des opposans ou de ceux soupçonnés de l’être ; mais il tient aussi, à la tête de la section occulte de l’état-major impérial, un poste de combat contre l’étranger, et son importance à cet égard suffit à rendre plausible sa suppression en 1802, lors du retour de la paix générale. Son rétablissement suit également