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LE PAYSAN POÈTE
DE LA SOUABE

II[1]
CHRISTIAN WAGNER ET SA FOI NOUVELLE


I

Que Christian Wagner soit un poète-né, marqué du signe divin, et désigné par sa fine sensibilité pour faire vibrer les âmes à l’unisson de la sienne, en ses heures d’inspiration favorable, c’est ce dont il sera facile de se convaincre par la lecture du quelques morceaux, choisis dans son œuvre entre les plus simples, parmi ceux qui n’affichent que le souci de plaire, et non la prétention d’enseigner. Notons d’abord que notre homme est, sur toutes choses, le chantre des fleurs, qu’il aime d’un amour passionné. Schopenhauer disait déjà de ces frôles chefs-d’œuvre[2] : « Ut, pro eo quod nosse non possunt, quasi innotescere velle videantur. Privées de sentiment, elles en veulent susciter dans les âmes pensantes. » Elles sont obéies à souhait par ce fidèle adorateur, et l’œil de Christian Wagner ne peut se passer de leurs couleurs éclatantes ; quand l’hiver a revêtu la terre d’un manteau de neige, il s’écrie dans sa détresse : « Malheur à moi ! Tout me manque quand les fleurs me font défaut. » Son vœu le

  1. Voyez la Revue du 1er octobre.
  2. D’après saint Augustin.