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les fermer, car elles seraient bientôt désertes. La commission du budget sait parfaitement à quoi s’en tenir sur la portée pratique et immédiate de ce second vote aussi bien que du premier. Une fois de plus, elle n’a voulu faire qu’une manifestation. Mais cette manifestation montre que, par préjugé sectaire, par haine de la religion et de tout ce qui s’y rattache, les radicaux et les socialistes, s’ils étaient un jour maîtres de la Chambre comme ils le sont de la commission du budget, ne respecteraient pas plus ce qui nous reste de la grandeur de la France au dehors que la tranquillité des esprits et la paix des consciences au dedans. Et, grâce au gouvernement actuel, le progrès des radicaux et des socialistes s’accentue de jour en jour.

Peut-être devrions-nous supprimer dès maintenant les radicaux dans la nomenclature des partis, comme ils se suppriment eux-mêmes au profit des socialistes. Il n’y aura bientôt plus de radicaux ; leur abdication est déjà presque complète. L’importance des questions purement politiques va sans cesse en diminuant. Si le monde continue d’évoluer dans le sens où il le fait depuis quelque temps, la situation future et prochaine sera des plus simples : il y aura d’un côté le parti socialiste qui s’intitule lui-même le parti de la Révolution, et de l’autre le parti de la conservation sociale, qui n’aurait pas trop de toutes ses forces pour résister à l’orage dont nous voyons les nuages s’amonceler sur nos têtes.

Pendant les jours qui ont précédé la rentrée des Chambres, ces nuages ont paru surchargés d’électricité. On ne parlait que de la grève générale, et dans un congrès récent tenu à Lyon les orateurs les plus compétens en pareille matière avaient pris soin de dire qu’à moins d’être une duperie pour les ouvriers, la grève générale devait être la Révolution. Ce qu’est la Révolution pour ces esprits violens, mais confus, il serait difficile de l’expliquer exactement ; mais on ne se tromperait pas de beaucoup en disant que c’est le recours à la force et au pillage. La mainmise des ouvriers sur tous les instrumens de travail ne peut évidemment pas s’accomplir par la seule persuasion, ni par la douceur : on ne recule pas devant d’autres moyens, on en proclame même la nécessité et l’urgence. Toutefois la grève générale devait, pour le moment, ne s’étendre qu’à l’industrie minière. Mais, une fois commencée, on se réservait, si l’occasion paraissait propice, de lui donner une plus grande extension, et même de la rendre complète et intégrale. Les projets des ouvriers, ou plutôt ceux qu’on forme pour eux et avec lesquels on exalte leur imagination, ont cela de particulièrement dangereux qu’on n’en aperçoit pas les limites. Les