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fatigantes manœuvres du temps de paix. Et s’il en est ainsi, sera-ce bien le moment, quand vous rentrerez au port, quand tout votre monde, en pleine détente nerveuse, soupirera après un repos si mérité, si nécessaire, d’exiger encore des efforts qui, de votre propre aveu, sont éreintans. Par le fait, vous aurez beau les exiger…

— Oh ! oh ! nous les obtiendrons tout de même, si nous les exigeons. Je reconnais toutefois que votre nouvelle objection a du fondement ; mais, d’autre part, la nécessité des ravitaillemens rapides n’étant pas discutable (surtout pour la marine la moins forte, où la mobilité, l’activité doivent balancer autant que possible l’insuffisance numérique des unités de combat), je ne vois pas comment…

— C’est bien simple : faites embarquer le charbon, à bord, par des corvées empruntées au dépôt des équipages, à terre… Et ce que je dis du charbon s’appliquera aussi bien aux vivres, aux munitions, bref à l’ensemble du ravitaillement. Vous trouverez là le parfait emploi, — en attendant mieux, — de ces « énormes » contingens d’inscrits maritimes et de réservistes que l’on a tant reproché à la marine, depuis quinze ans, de ne pouvoir ou savoir utiliser. et en même temps vous sortirez de la fâcheuse dépendance d’un entrepreneur civil ; vous substituerez à des mercenaires inconnus, de bonne volonté plus que douteuse, un personnel sûr, discipliné, animé d’un excellent esprit…

— Au demeurant, voulez-vous que je vous dise ?… Les cas seront rares où une telle précipitation deviendra nécessaire, et plus rares encore ceux où les bâtimens revenant de la mer après plusieurs jours, après des semaines, peut-être, de croisière, n’auront pas à demander au port autre chose que du charbon, de l’eau, des vivres frais et des munitions. Ils auront tous des réparations à faire, du matériel à changer, — et les opérations de ce genre dureront, quelque zèle qu’on y apporte, beaucoup plus de deux heures.

— Soit ! mais je tiens toujours que nos exercices d’embarquement furent excellens, comme tout ce qui entraîne les hommes, comme tout ce qui leur donne la pleine conscience et l’exacte mesure de leurs forces, tout ce qui développe l’émulation en même temps que la confiance mutuelle, car s’il y a un « exercice général, » c’est bien celui-là… et vous savez quel est l’intérêt des exercices généraux pour nos équipages modernes,