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On n’attend plus que le grand canot à vapeur du Courbet, qui doit prendre à la remorque, pour le conduire à bord du Médoc, notre chapelet d’embarcations… Mais rien ne vient.

10 h. 40. — enfin, le signal d’envoyer les embarcations le long des paquebots se déferle à bord du Massena. Le canot à vapeur du Courbet arrive aussitôt, et voilà les nôtres parties. Bonne chance là-bas ! Et en attendant qu’elles reviennent, — ce ne sera pas de sitôt : nos hommes ont emporté leur dîner… — voici, pour nous distraire, les cuirassés de la Méditerranée qui arrivent… un peu tard vraiment ! Mais savent-ils quel rôle leur faisait jouer notre thème d’opérations ? En tout cas, c’eût été miracle qu’ils apparussent ce matin, juste à point nommé.

D’ailleurs, ils ne viennent pas jusque devant la Pallice, où tous les postes de mouillage sont occupés, et l’amiral leur signale d’aller en rade des Trousses, à quelques milles au sud, vers l’île d’Aix et Oléron.

5 heures du soir. — Eh bien ! la descente, le combat sur la plage, la prise de la Pallice ?… Qu’est devenu tout cela ?…

— Ce que c’est devenu ? ma foi ! nous ne le savons guère… Nous avons vu là-bas, au Nord, des tireries lointaines, des groupes d’embarcations qui allaient et venaient, de grandes allèges qui sortaient de la Pallice et qu’on remorquait aux paquebots, et la journée s’est passée ici fort tranquille à compter les cheminées d’usine à terre et à regarder couler l’eau le long du bord… Elle a coulé très vite, du reste, car les marées sont fortes en ce moment et nos canots ont dû s’en apercevoir.

Au surplus, les voici qui reviennent. De M… va nous renseigner.

— Peuh ! Je n’ai pas vu grand’chose non plus, dit-il en dégrafant son sabre ; nous avons fait d’abord, avec d’autres groupes d’embarcations, un premier voyage des paquebots à la plage, qui est assez commode, quoique toute en galets, parce qu’elle a une inclinaison sensible et que les canots ne s’échouent pas trop loin. Avant d’arriver et pendant un demi-mille au moins, nous étions fusillés par les troupes de la défense, ce qui ne nous a pas émus, comme bien vous le pensez…

— Ah ! ah !…

— Mais oui,.. seulement il faut ajouter que depuis une bonne demi-heure nos bâtimens légers les couvraient d’obus… fictifs, ces chers défenseurs, sans qu’ils parussent s’en préoccuper.

— Vous nous en direz tant…