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nouvel état social de l’Europe, formerait comme un appendice nécessaire au droit des gens européen.


III

Dans cette intention et pour parer en commun au commun péril ou aux difficultés communes, l’Empereur allemand prit, après la Confédération helvétique qui, la première, en avait émis l’idée, l’initiative de réunir à Berlin une conférence internationale où ces questions seraient étudiées en commun. Ce sont presque les expressions mêmes que nous venons d’employer dont se servait le prince de Bismarck en transmettant aux ambassadeurs le rescrit impérial du 4 février 1890 : « Vu la concurrence internationale sur le marché du monde, disait-il, et vu la communauté des intérêts qui en provient, les institutions pour l’amélioration du sort des ouvriers ne sauraient être réalisées par un seul État, sans lui rendre la concurrence impossible vis-à-vis des autres. Des mesures dans ce sens ne peuvent donc être prises que sur une base établie d’une manière conforme par tous les États intéressés. Les classes ouvrières des différens pays, se rendant compte de cet état de choses, ont établi des rapports internationaux qui visent à l’amélioration de leur situation. Des efforts dans ce sens ne sauraient aboutir que si les Gouvernemens cherchaient à arriver par voie de conférences internationales à une entente sur les questions les plus importantes pour les intérêts des classes ouvrières[1]. » Et ce sont les mêmes expressions encore qu’avait personnellement employées l’Empereur : « Je suis résolu à prêter les mains à l’amélioration du sort des ouvriers allemands, dans les limites qui sont fixées à ma sollicitude par la nécessité de maintenir l’industrie allemande dans un état tel qu’elle puisse soutenir la concurrence sur le marché international et d’assurer par là son existence ainsi que celle des ouvriers… Les difficultés qui s’opposent à l’amélioration du sort de nos ouvriers, et qui proviennent de la concurrence internationale, ne peuvent être, sinon surmontées, du moins diminuées, que par l’entente internationale des pays qui dominent le marché international[2]. » Ce sont enfin ces

  1. Lettre de la Chancellerie impériale à l’ambassadeur d’Allemagne à Paris, 8 février 1890. Livre Jaune sur la Conférence internationale de Berlin, 15-29 mars 1890, p. 10.
  2. Conférence internationale de Berlin, Livre Jaune, p. 11.