Ensuite, les sociétés de secours mutuels étendent leur action et s’affranchissent : on les engage et on les aide par une subvention à constituer, de leur côté, sans préjudice de la caisse nationale, et d’accord avec elle, un fonds de retraites spécial à leurs membres ; on fixe à cinq ans la durée des fonctions de leurs présidens ; et ces présidens, on leur permet enfin de les élire elles-mêmes ; ainsi que les sociétés de bienfaisance, on les exempte de la taxe qui frappe les autres sociétés, cercles ou lieux de réunion : on règle et on combine leur jeu avec celui des deux caisses d’assurances en cas de décès et en cas d’accidens, auprès desquelles on s’efforce de leur permettre de contracter des assurances collectives ; quand elles ont foisonné et couvrent le territoire de la métropole, on les transplante au-delà des mers et, sous les espèces de sociétés indigènes de prévoyance, de secours et de prêts mutuels des communes d’Algérie, on s’efforce d’inaugurer comme une colonisation de la mutualité[1]. De 1852, date du premier décret-loi organique, à 1898, date de la loi qui la réorganise, la mutualité ne cesse de croître et de multiplier : elle s’épanouit, elle essaime, elle triomphe ; et, comme elle a justifié les plus grandes espérances, volontiers on place en elle des espérances intimes ; parce qu’elle a beaucoup fait, on est parfois un peu enclin, et peut-être un peu trop, à lui demander de tout faire.
Aux caisses d’épargne, on ne peut demander que de susciter et de faciliter l’épargne, en la rendant commode, sûre et fructueuse, en la plaçant pour ainsi dire à la portée de tout le monde, et pour ainsi dire en allant l’offrir partout à domicile. L’esprit d’épargne étant d’ailleurs comme une parcelle constitutive du caractère français, l’épargne étant chez nous comme « psychologique » ou psychologiquement donnée, les caisses d’épargne sont une des institutions dont s’occupe en premier lieu notre législation sociale. Mais, avant même toute législation sociale, elles étaient apparues sous forme quasiment de produit spontané : vers la fin du XVIIIe siècle, on avait vu surgir du sol le Bureau d’économie, la Chambre d’accumulation des capitaux et intérêts composés, la célèbre Tontine Lafarge, qui justement avait pris le titre de Caisse d’épargne. La première caisse d’épargne
- ↑ Décrets des 20 avril 1856, 18 juin 1864, 22 septembre 1870 et 27 octobre 1870, loi de finances de l’exercice 1871, décret du 28 novembre 1890, loi du 11 avril 1893, décrets du 30 mars 1896, loi du 1er avril 1898. décret du 14 mai 1898.