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été conduit à l’imaginer, réalise parfaitement cette condition.

La dernière défaite du système de l’émission s’est produite sur le terrain de la diffraction. Nous avons vu précédemment que Newton considérait la propagation rectiligne de la lumière comme une vérité absolue contradictoire à la théorie des ondes. C’était sa forteresse inexpugnable. « La lumière ne connaît pas de détours, disait-il ; elle n’envahit jamais les ombres portées par les corps opaques. Le projectile lumineux émis par la source suit inflexiblement son trajet, capable de ricocher contre une surface, — et c’est la réflexion ; capable de pénétrer dans un milieu matériel et d’y subir une déviation, — et, c’est là la réfraction ; incapable d’exécuter des mouvemens tournans. L’observation des systèmes d’ondes connus ne montre rien de pareil. Le son se propage par des ondes : mais aussi il n’y a pas d’ombres sonores : un écran qui protège contre une balle, ne protège pas l’oreille contre le bruit de la détonation. Les ondulations formées à la surface de l’eau tranquille sont dans le même cas : le mouvement arrêté par un obstacle le contourne et se propage derrière lui.

L’argument paraissait solide. L’expérience en a eu raison. Nous avons vu que lorsque la source lumineuse présente des dimensions très petites et qu’elle tend à se réduire à un point, on voit les ombres réelles s’élargir et dépasser l’ombre géométrique. Newton qui connaissait le fait, très gênant pour son système, imagina une sorte d’action de ricochet exercée sur les projectiles lumineux qui touchent le bord de l’écran, par laquelle ils sont rejetés latéralement. Mais ce n’est pas seulement vers le dehors que la lumière est repoussée, c’est aussi vers le dedans. Contrairement à ce que Newton a affirmé, la lumière envahit l’ombre. Il y a des franges lumineuses intérieures. Un cas remarquable est celui offert par un petit écran circulaire : au centre de l’ombre géométrique, il y a un point lumineux : une aiguille fine, un cheveu, éclairés par une source linéaire, fournissent des systèmes de franges alternativement claires et obscures. C’est Fresnel qui signala ces phénomènes et en fournit l’explication rigoureuse au moyen de la théorie des ondes.

Il restait une dernière tâche à accomplir pour que le triomphe du système de l’éther fût complet. Il fallait expliquer pourquoi, dans les cas ordinaires, la propagation en ligne droite est le fait d’observation indéniable. C’est ce que l’on démontre, par une