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mécanique adoptée présentement, si nous pouvions nous transporter en un point de l’un de ces rayons solaires et percevoir ce qui s’y passe réellement, nous ne trouverions pas autre chose que le tremblotement, infiniment rapide et infiniment réduit, d’une particule d’éther. Il n’y a rien de plus, objectivement, que ce phénomène simple et nu, d’un corpuscule vibrant. Si cette vibration est mise ultérieurement en rapport avec une rétine, il en résultera une sensation de lumière, par exemple de lumière jaune : si le contact a lieu avec une région de la peau où les terminaisons nerveuses du sens thermique soient développées, cette même vibration provoquera une sensation de chaleur : si, enfin, cette vibration tombe sur la plaque photographique, elle sera l’occasion d’un phénomène chimique. Et, suivant ces occurrences, le même rayon, la même suite de molécules vibrantes, aura mérité les noms de rayon lumineux, de rayon de chaleur, ou de rayon chimique, qui ne sont, comme on le voit, que l’expression des réactions d’un même être objectif sur des réactifs divers ; quelque chose comme les titres et dignités d’un seul et même personnage. Telles sont les idées qui règnent aujourd’hui, en ces matières. Elles ont eu besoin, pour s’établir, d’une série de travaux échelonnés sur un demi-siècle, de 1806 à 1860 environ.


Le fluide calorifique étant allé rejoindre ses collègues magnétiques dans le musée rétrospectif de la science, il ne restait plus, en fait d’agens impondérables, dans le champ de la physique, que les deux fluides électriques, le positif et le négatif, en face de l’éther lumineux. Mais la dualité de l’électricité n’offre pas de nécessité. De tout temps on lui a reproché d’être une hypothèse aussi arbitraire qu’inutile.

Après la découverte de la pile, les physiciens prirent l’habitude de supprimer le fluide négatif de leurs préoccupations, de le sous-entendre ou de l’omettre, et de ne considérer qu’un seul fluide, le fluide positif, circulant dans le sens du courant. Mais, sans sortir du domaine même de l’Electrostatique, la doctrine des deux fluides, fondée sur la différence que le physicien Dufay avait constatée le premier, en 1733, entre les modes d’électrisation par frottement du verre et de la résine, n’avait jamais rencontré un assentiment universel. C’est le savant anglais Boyle qui avait proposé, en 1670, l’idée de fluide électrique ; mais, il n’en avait imaginé qu’une espèce. On s’en était contenté